Terminus

En 2019, les éditions Albin Michel Imaginaire publiaient le premier livre traduit en français (par Michel Pagel) de Tom Swterlitsch: Terminus. Remportant les suffrages, ce thriller de science-fiction est depuis paru en poche en mars dernier chez Le Livre de Poche, ainsi qu’en format audio en février, chez Audible, avec une lecture réalisée par Paul Borne. C’est dans ce dernier format que j’ai eu envie de découvrir ce titre avant la parution d’un second roman (Demain et le jour d’après) à la fin du mois chez Albin Michel Imaginaire. Et voici ce que j’en ai pensé…

« On m'a dit d'imaginer un mur de portes, dit-il. On m'a dit que, si je filais dans l'espace en direction d'un mur de portes, j'en franchirais une. N'importe laquelle me conduirait dans le futur. Des portes différentes pour des futurs différents. Des versions différentes du futur.»

Voyage dans le temps, fin du monde et enquêtes

L’intrigue de Terminus est assez brillante! Nous offrir une bonne enquête, pleine de rebondissements et d’implications tout en réussissant à proposer comme centrale une thématique de voyage temporel est un exercice compliqué. Mais l’auteur réussit parfaitement ce travail avec une dimension de science-fiction réfléchie, construite et cohérente qui réinvente la notion de multivers intelligemment. Le voyage temporel dans ce roman est élaboré, logique. Et si parfois, dans le final, certains éléments peuvent paraître plus nébuleux à la lecture, le roman est parfaitement compréhensible et l’univers crédible. Je craignais personnellement ce roman que j’imaginais trop complexe, à tort. Mais l’ensemble, bien que d’un volume conséquent (plus de 14h30 d’écoute) est tout à fait accessible et, malgré plusieurs voyages temporels, ne nous perd jamais à la lecture grâce à un world building maîtrisé. Brillante, l’intrigue est aussi portée par une héroïne remarquable dont la ténacité est si exceptionnelle qu’elle marque les esprits. Elle porte l’intrigue et nous emmène au-delà de tout ce qu’on aurait pu imaginer. Nulle doute que si l’adaptation cinématographique en projet est réussie, elle brillera par ce courage hallucinant, continuant à avancer alors que tout la pousse à abandonner. Côté audio, je regrette par contre l’interprétation de Paul Borne, particulièrement sur les dialogues. Il m’a semblé souvent avoir la mauvaise intention dans la voix ou il se perd souvent dans les tentatives de donner des voix différentes aux personnages. La mère de Shannon a ainsi une voix si désagréable à l’audio que j’avais envie de passer les chapitres. Shannon elle-même, perd de son charisme dans ses lignes de dialogue et c’est un peu dommage. Je pense que Terminus est excellent, mais qu’il vaut mieux le découvrir sous d’autres formats que l’audio.

« Rien ne disparaît, rien ne s’achève. Tout existe. Tout existe à jamais. La vie n’est qu’un rêve, Shannon. Le moi est l’unique illusion. »

Noir, sang et mort

Mon avis est évidemment influencé par la version audio du livre, l’interprétation de Paul Borne m’ayant posé quelques problèmes. Il est fort possible que les éléments que je soulève ne sont pas aussi prégnants dans les autres formats de lecture. Je pense que pour lire Terminus il est nécessaire d’avoir un moral plus ou moins bon (parce que c’est assez déprimant) et surtout le coeur bien accroché. Car ce qui m’a tout de suite frappé à l’écoute de Terminus, c’est le côté très sombre, gore parfois, avec une cruelle insistance sur la souffrance, sur le sang ou les descriptions organiques, aspect qui est renforcé par la voix caverneuse de Paul Borne en audio. En moins d’une heure d’écoute, je dressais déjà une liste à rallonge de content warning et j’avais des difficultés à enchaîner certaines scènes qui décrivaient un peu trop longuement des cadavres mutilés. Si cela finit par devenir moins prégnant par la suite (quoique!), c’est un aspect du roman qui peut déranger et que l’audio rend parfois difficilement supportable, surtout si vous l’écoutez après votre petit déjeuner. Bref, Terminus c’est pas du tout le monde des Bisounours.  L’ambiance est sombre, âpre, elle vous colle aux basques comme une mélasse gluante dans un puit sans fond. Un brin déprimant… Polar noir, fin du monde, meurtres à répétition, Tom Sweterlitsch nous offre donc un vrai roman noir tout en nous offrant aussi une belle intrigue de science-fiction. Il faut savoir l’encaisser par contre.

En bref, Terminus est un roman assez brillant qui nous propose une vraie enquête aux accents de roman noir, à l’ambiance sombre et âpre, tout en axant l’ensemble sur un principe de voyages temporels cohérent et crédible. Sanglant, déprimant, le roman peut aussi démoraliser ou déranger si on n’a pas le coeur bien accroché. Bien que le roman m’a paru assez génial, la version audio a considérablement entaché mon plaisir avec une interprétation peu convaincante des personnages qui a brisé régulièrement l’immersion.

« Depuis le début des années 80, un programme ultrasecret de la marine américaine explore de multiples futurs potentiels. Lors de ces explorations, ses agents temporels ont situé le Terminus, la destruction de toute vie sur terre, au XXVIIe siècle.

En 1997, l’agent spécial Shannon Moss du NCIS reçoit au milieu de la nuit un appel du FBI : on la demande sur une scène de crime. Un homme aurait massacré sa famille avant de s’enfuir. Seule la fille aînée, Marian, 17 ans, serait vivante, mais reste portée disparue. Pourquoi contacter Moss?

Parce que le suspect, Patrick Mursult, a comme elle contemplé le Terminus... dont la date s’est brusquement rapprochée de plusieurs siècles. »

(Illustration de couverture: © Aurélien Police)

D’autres avis sur cette édition dans la blogosphère: Le culte d’Apophis (VO), Au pays des cave trolls, Albédo, Les chroniques du chroniqueur, Blog-o-livre, TmbM, L’épaule d’Orion, RSF, Les lectures du maki, Un papillon dans la lune, Chut… Maman lit!, 233°C, Un bouquin sinon rien, …

[Diversité: pp handicapé.e physique - membre artificiel, ps noir.e]

Addiction, Alcool, Amputation, Cancer, Deuil, Drogue, Féminicide, Fusillade, Gore, Meurtre, Mort, PTSD, Sang, Sexe, Suicide, Terrorisme, Validisme

[Lecture n°36/72 (pour l'échelon 5 Fusion dans l’utopique) pour le Challenge de L'Imaginaire édition 9 de Ma lecturothèque]