Une bonne intention

Après avoir adoré la prestation de Bénédicte Charton en tant que lectrice de la trilogie de N.K. Jemisin, j’ai eu envie de tenter une autre découverte audio avec sa voix. Je me suis alors tournée vers Une bonne intention, thriller psychologique/polar de Solène Bakowski qu’on m’avait souvent conseillé de découvrir et qui a été adapté en livre audio en 2020 par Audible studios. Voici donc ce que j’en ai pensé…

"La maîtresse raconte qu'écrire ça fait fuir la douleur. Que la douleur, elle n'aime pas trop les mots, qu'ils lui font peur à cause du pouvoir qu'ils ont sur les gens et sur les sentiments. Magali, ma maîtresse, elle ajoute que la peine est moins lourde à porter, qu'elle est même toute rabougrie quand on la raconte. C'est comme de la magie."

Une narration particulière

Difficile de classer réellement Une bonne intention. Ni tout à fait polar, ni tout à fait thriller psychologique, ni tout à fait drame, c’est un roman qui navigue sur les trois tableaux et nous propose une intrigue en 3 temps. Le premier, celui de la disparition, est un moment où les personnages sont posés face au drame. C’est une partie plutôt classique, dont on a les clefs. Le second temps nous révèle un autre pan de l’histoire, un autre point de vue, extérieur à la famille sur l’avant et le pendant, faisant des révélations qui n’en sont pas vraiment et qui contredisent nos certitudes sur ce que nous lisons vraiment. La fin, plus cruelle et plus insidieuse, plonge ses racines dans les secrets de famille que seul un drame peut déterrer. C’est un roman où la situation qu’on penserait être le cœur du mystère n’est finalement qu’un prétexte. Et c’est aussi perturbant que rafraîchissant. Et on est finalement récompensé de notre attente quand les révélations finales s’enchaînent. L’autrice se joue de nos habitudes, joue également avec les codes du genre et creuse la thématique du secret de famille avec force dans un roman qui est différent de ce qu’il semble être.

"Tous passeront à côté du sacrifice de l'un, de la confiance aveugle de l'autre, tourneront le dos à cet amour dingue, car c'est de ça qu'il s'agit, cet amour inconditionnel d'un jeune homme pour une fillette qui écrivait des lettres, cet amour d'une petite fille pour le jeune homme qui savait lui inventer des histoires."

Un brin déçue

Il s’agissait ici du premier livre de Solène Bakowski que je lisais. On me l’avait présentée comme une autrice un brin machiavélique qui excellait dans l’écriture de ses personnages. La chute a été d’autant plus rude lors de la première moitié de mon écoute quand je trouvais les personnages très exagérés et peu crédibles. Leurs réactions créent une impression de malaise et d’étrangeté. On ne comprend pas vraiment leurs sentiments hors-propos ou exacerbés à l’extrême. Et même si la fin de l’ouvrage répond proposent des explications et des justifications à certains actes, j’ai trouvé la psychologie des personnages globalement maladroite et certaines scènes m’apparaissaient à l’écoute comme sonnant faux. Pourtant, Bénédicte Charton leur fait honneur, avec une prestation à la hauteur mais qui ne comble pas les lacunes dans l’écriture. Le roman exagère aussi un peu trop sur le pathos. On sent qu’il est fait pour nous toucher, pour nous faire pleurer. Mais l’excès a fait l’effet inverse chez la pleurnicheuse que je suis alors que les situations étaient propices à l’émotion. Je me suis globalement ennuyée sur les deux premiers tiers du roman. La troisième partie, pleine de révélations, de secrets de famille et de réflexions sur le traitement de la parole des enfants par les adultes est un passage vraiment intéressant qui m’a bien accrochée. Mais il arrive un peu tardivement.

En bref, je suis moyennement convaincue par Une bonne intention. C’est un roman surprenant, parce que les mystères ne sont pas forcément là où ils semblent être et la performance de Bénédicte Charton à l’audio est réussie. Mais les personnages sont globalement mal écrits, allant dans des extrêmes peu crédibles qui nous sortent du récit. Le roman exagère aussi sur le pathos, essayant en vain de créer une émotion qui avait tout pour naître mais à laquelle il manquait un peu de finesse. Dommage.

« Mati a neuf ans. Elle a perdu sa maman. Son père s'enlise dans le deuil et sa grand-mère s'efforce, à sa manière, de recoller les morceaux. Un soir, la petite ne rentre pas de l'école. On imagine le pire, évidemment. Comment croire que tout, pourtant, partait d'une bonne intention ? »

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