Hors-série Une Heure-Lumière 2021 : Un château sous la mer

Quatrième hors-série de la collection Une Heure-Lumière des éditions Le Bélial’, l’édition 2021 est sortie au mois de mai et offerte pour l’achat de deux numéros de la collection (ce hors-série est d’ailleurs quasi épuisé, dépêchez-vous s’il vous intéresse !). Cette année, ce numéro spécial met à l’honneur Greg Egan avec sa novella Un château sous la mer, traduite par L’épaule d’Orion. Et voici ce que j’en ai pensé…

"Nous nous réveillons avec le souvenir de ce que les autres ont vécu, répondit Rufus. Pendant notre sommeil, où on inscrit notre propre vécu dans notre mémoire à long terme, on reçoit suffisamment de données pour faire de même avec le vécu des autres. On se souvient être eux, autant qu'être nous-mêmes."

Un texte plein d’humanité

Cela m’avait déjà surprise et frappée dans Cérès et Vesta du même auteur, la hard-science de Greg Egan est loin de l’image froide et déshumanisée que je m’en étais fait. Également plutôt accessible, Un château sous la mer est en effet un texte centré sur l’humain plus que sur les aspects technologiques sous-jacents. Nul besoin de tout saisir pour apprécier pleinement la lecture qui n’est pas avare en émotions ou sentiments, tout en proposant de belles pistes de réflexion. S’inscrivant dans un registre transhumaniste, Un château sous la mer nous amène à la rencontre de quatre frères qui ont pour particularité de partager un lien neuronal à la suite des manipulations qui ont été faites sur eux durant leur enfance dans une secte. C’est un texte qui interroge la notion de libre arbitre, d’indépendance, de concurrence aussi entre frères et, surtout, de l’identité. Greg Egan nous propose tous ces thématiques au cœur d’une histoire un brin policière, où 3 frères tentent de retrouver la piste du quatrième avec qui le lien a été rompu. Véritable chasse à l’homme orchestrée par des génies, c’est un récit assez prenant qui nous est proposé.

"Aucun de nous n'est seulement lui-même."

Des références à Dostoïevski et un final étonnant

Dans cette novella de science-fiction, l’auteur australien verse des clins d’œil à Dostoïevski et plus particulièrement aux Frères Karamazov. Je suis sans doute passée à côté de toutes ces références ayant lu ce classique il y a bien trop longtemps mais j’ai apprécié de voir se mêler de la littérature russe à un texte transhumaniste. Érudit, le texte reste pourtant toujours accessible et la lecture fluide. Du moins, jusqu’à son final. Celui-ci arrive brutalement et nous laisse avec une énigme que je n’ai malheureusement pas comprise. Ce qui est fort dommage quand on a si apprécié le reste de la lecture ! La fin me laisse donc un sentiment troublé. L’impression de ne pas avoir la clé de cette histoire est peu frustrant. Sur un tout autre registre, je tiens à signaler que ce 4ème hors-série n’est accompagné que d’une préface et du catalogue de la collection. Pas d’interviews ou de rencontres avec les acteurs du monde du livre comme ce fut le cas précédemment. J’avoue que ça manque un peu.

En bref, Un château sous la mer de Greg Egan est un texte très intéressant et accessible qui nous propose un récit de transhumanisme qui interroge la notion d’identité et de libre arbitre tout en y versant des références à Dostoïevski. Le final, abrupt et énigmatique m’a cependant laissé sur une interrogation frustrante. Un peu dommage car le texte, plein d’humanité, m’avait transporté.

(Illustration de couverture : © Aurélien Police)

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