L’hiver de la sorcière (Trilogie d’une nuit d’hiver, #3)

Après avoir été envoûtée par L’ours et le rossignol puis conquise par La fille dans la tour, il me tardait de lire le troisième et dernier tome de la trilogie d’une nuit d’hiver de Katherine Arden, à savoir L’hiver de la sorcière. Ce dernier opus devait paraître fin mars dans la collection Lunes d’encre des éditions Denoël mais a été repoussé avec la crise sanitaire actuelle. Il est cependant paru en numérique en avril et vous pouvez donc d’ores-et-déjà le lire. Alors, cette conclusion est-elle à la hauteur? Voici ce que j’en ai pensé…

[NB: Un tout grand merci aux éditions Denoël pour ce service presse qui m’a comblé de joie!]

[NB2: Il est indiqué que ce titre peut se lire séparément des autres tomes. Cependant, si vous voulez en profiter au maximum, je vous les conseille vivement dans l’ordre. Cette critique peut révéler quelques aspects des deux premiers épisodes, aussi passez votre chemin si vous voulez garder la surprise. Pour ceux ayant lu les 2 premiers tomes, aucun risque ici.]

« Les imbéciles. Je les avais prévenus. »

Vassia lui adressa un grand sourire, sans la moindre chaleur. « Vous n’auriez pas dû leur dire que j’étais une fille. Alors, ils auraient peut-être cru que je pouvais représenter un danger.»

Comme une chevauchée lumineuse au coeur des ténèbres

Lire L’hiver de la sorcière c’est s’échapper, c’est s’embarquer dans une chevauchée endiablée mais envoûtante au coeur de lieux mystérieux, sombres mais merveilleux. C’est une exploration de l’invisible si passionnant et un approfondissement de nos connaissances de la mythologie slave. En lisant, notre esprit s’éveille à l’inconnu et ne désire que croire, on ne cesse de rêver, de se laisser porter dans cet imaginaire au point d’échapper, le temps d’un livre, au monde réel. A tant s’immerger, on s’épuise parfois les nerfs, les larmes creusent des sillons au creux de nos joues, mais toujours, un vent frais finit par nous redonner notre vivacité, et l’émerveillement est tel que nous poursuivons sans relâche cette escapade littéraire. Katherine Arden est une conteuse qui susurre au creux de notre âme un troisième volet fabuleux qui a tout le charme des premiers et toute la force épatante d’une conclusion à la hauteur. Un dernier trait de génie qui relie pour de bon l’Histoire et celle des contes traditionnels toujours en sonnant vraie, réelle, crédible. On y croit, parce que l’immersion est totale. Pendant plus de 450 pages, on est au coeur de la Russie médiévale, à la fois glaciale et suffocante, à la fois hostile et belle, au coeur des batailles et des manipulations comme au coeur des foyers aimants et des forêts enchantées. Et bien que le voyage ne soit pas de tout repos, il nous laisse pantois d’émerveillement une fois les derniers mots parcourus.

« Une tête noire se redressa, puis une autre, plus claire. Soudain, tous les chevaux voltèrent, s’enfuirent. Sur leurs quatre pattes, ils fuirent le son de sa voix, droit vers le lac; mais à l’instant de toucher la surface, leurs sabots se muèrent en ailes. Devenus oiseaux, ils prirent leur envol au-dessus de la glace qu’éclairaient les étoiles. Vassia les regarda s’éloigner, des larmes de pur émerveillement dans les yeux.»

Dire au-revoir

Lire L’hiver de la sorcière c’est aussi retrouver Vassia, héroïne aussi forte que fragile et aussi indomptable qu’admirable. C’est comme retrouver une amie, avoir cette envie folle de la soutenir, parfois aussi de la raisonner, mais aussi et surtout ressentir une peine immense à l’idée de quitter pour de bon cette figure féministe puissante et emblématique. Quitter les autres aussi fait mal, tant ils ont tous pris de l’épaisseur de tome en tome, tellement plus d’ailleurs dans cette conclusion. Je sens, après avoir achevé mon voyage que c’est une histoire qui résonnera longtemps dans mon esprit, vers laquelle je reviendrai pour me plonger à nouveau avec délectation dans son ambiance si immersive. La plume si douce, envoûtante et poétique de l’autrice est évidemment l’atout qui fait de cette aventure une si belle escapade. Elle a su nous offrir tout un monde dans une intrigue riche qui ne s’épuise pas dans ce dernier volume mais atteint au contraire son point culminant en termes d’émotions et de plaisir. 

En bref, Katherine Arden est une tisseuse d’histoires qui nous offre ici une conclusion magistrale à la grande tapisserie de la Trilogie d’une nuit d’hiver. Une fin grandiose à la hauteur des précédents pour une saga coup de coeur.

« Moscou se relève difficilement d’un terrible incendie. Le grand-prince est fou de rage et les habitants exigent des explications. Ils cherchent, surtout, quelqu’un sur qui rejeter la faute. Vassia, avec ses étranges pouvoirs, fait une coupable idéale. Parviendra-t-elle à échapper à la fureur populaire, aiguillonnée par père Konstantin? Saura-t-elle prévenir les conflits qui s’annoncent? Arrivera-t-elle à réconcilier le monde des humains et celui des créatures magiques? Les défis qui attendent la jeune fille sont nombreux, d’autant qu’une autre menace, bien plus inquiétante, se profile aux frontières de la Rus’.»

(Illustration de couverture: © Aurélien Police)

> Lire un extrait < (© Denoël)

Tome 2 - La Fille dans la tour

[Lecture n°27/60 (pour l'échelon 4) pour le Challenge de Littérature de l'Imaginaire édition 8 de Ma lecturothèque]