Le bracelet de jade

Premier titre de la collection RéciFs qui s’annonce génial et qui est proposée par les éditions Argyll, Le bracelet de jade est une novella de l’autrice Mu Ming à paraître le 13 septembre prochain. J’ai eu la chance de pouvoir m’y plonger en avant-première et voici ce que j’en ai pensé…

Quelques mots sur cette nouvelle collection 

RéciFs est une collection de textes courts (novella, roman court, etc.) où l’on ne retrouvera que des textes d’autrices. Un parti pris qui, évidemment, me plaît énormément quand on sait la difficulté pour les autrices d’imaginaire de publier leurs textes et la qualité et l’originalité de leurs œuvres par ailleurs. L’identité graphique de cette collection est en plus confiée à une artiste ultra talentueuse: Anouck Faure. Un combo absolument parfait en somme! Le 13 septembre, ce sont les deux premiers titres de la collection qui paraissent, Le bracelet de jade de Mu Ming, autrice chinoise résidant à, New York dont, je crois, aucun texte n’avait encore bénéficié de traduction française jusqu’à maintenant; et L’agneau égorgera la lion de Margaret Killjoy, femme trans anarchiste dont j’avais eu le plaisir de découvrir la plume et les idées audacieuses et radicales avec Un pays de fantôme. 

«  Ce monde est vaste, mais les lieux où la multitude des hommes peut trouver le repos et vivre en paix sont rares »

Entre poésie, philosophie et hard-SF

Le bracelet de jade est une novella qui nous fait voyager. Elle nous plonge à la fois dans l’histoire et la culture de la Chine avec un récit inspiré des classiques de la littérature chinoise et de l’importance des jardins. Point d’inquiétude si vous êtes totalement néophyte sur des deux aspects, une préface bienvenue vient apporter quelques éclaircissements sur les références citées dans le récit ainsi qu’une mise en contexte pour saisir ce qui se joue dans le creux des pages. Si j’ai conscience de manquer d’énormément de connaissances pour apprécier totalement cette novella à sa juste valeur, j’ai néanmoins parfaitement réussi à voyager durant ma lecture. Comme dans un songe provoqué par le bracelet de jade, j’ai parcouru avec la curieuse Chen et son père, si sage, ce jardin magnifique aux incroyables promesses. J’ai admiré la beauté simple d’une nature porteuse de sens. J’ai essayé de saisir l’essence de la philosophie qui nous est ici transmise, portée par la beauté poétique qui se dégage de l’ensemble, de l’importance du vide à l’espoir d’un ailleurs plus accueillant. Les récits de Chen et de son père s’entremêlent, comme les temporalités, dressant par leur assemblage une fresque d’un monde en plein changement, que ce soit à hauteur d’un Empire avec la chute d’une dynastie ou à hauteur humaine avec les désillusions de l’adulte et les liens intergénérationnels qui se tissent et s’étiolent. Les genres de récit eux-mêmes semblent se mêler les uns aux autres, tantôt sous un angle merveilleux, puis progressivement vers de la hard-SF amené en toute légèreté, parlant de distorsion du temps et de l’espace. Il est fascinant de voir ces récits se tordre et se mêler pour créer quelque chose de globalement fascinant. À l’image d’un certain sculpteur de bracelet, Mu Ming nous offre, par ses mots mais aussi par ses silences, une porte vers un monde à découvrir. Et c’est épatant. Il se dégage de ce récit un sentiment d’apaisement rare, suspendant le temps durant une lecture aux richesses folles pour un si petit format.

« Si tu cherches à dessiner un paysage naturel, il est tout aussi important de savoir où laisser des espaces vierges que de savoir dessiner un arbre ou un rocher. Les tableaux les plus subtils ne sont pas ceux peints à l’encre, mais ceux façonnés par le vide.»

En bref, la collection RéciFs commence avec un récit audacieux, original et épatant qui nous emmène au cœur de l’histoire et de la culture chinoise pour une novella qui suspend le temps, cache dans ses silences une richesse incroyable et mêle autant le fantastique merveilleux que la hard-SF dans un récit philosophique fascinant. Un début de collection ô combien prometteur où la plume de Mu Ming nous fait voyager par sa poésie et sa qualité.

« 1640, treizième année du règne de l’empereur Chongzhen.
Alors que la dynastie au pouvoir affronte de nombreux remous, la jeune Chen se rend, accompagnée de son père, à la Foire des Lanternes sur le Mont du Dragon. Émerveillée par mille lumières, Chen s’égare et se retrouve face à un étrange commerçant qui lui offre un magnifique bracelet de jade.
Le bijou exerce bientôt une grande fascination sur la jeune fille, au point que ses rêves la projettent dans un monde étrange.
Au fil des discussions avec son père, ancien haut-fonctionnaire qui se consacre désormais aux arts de la calligraphie et des jardins, Chen découvrira que les chemins de la vie se tissent autant dans les aspérités du vide que dans les souffles suspendus du temps.»

(Illustration de couverture: © Anouck Faure)

- Livre reçu en service presse. Publication non rémunérée. Merci aux éditeurs. - 

[Diversité: pp asiatique - chinois.e, ps asiatique - chinois.e]

[Lecture n°34 (44/60 points avec les bonus pour l'échelon 4 Fusion dans l’utopique) pour le Challenge de L'Imaginaire édition 12 de Ma lecturothèque + défi trimestriel juillet/septembre « Sunval » - Faites-nous voyager]