La marche du levant

Le 2 septembre dernier, la collection Albin Michel Imaginaire faisait sa rentrée avec deux titres: Quitter les monts d’automne d’Emilie Querbalec que j’ai critiqué (très positivement) il y a peu et La marche du levant de Léafar Izen. Titre de sience-fantasy, ce dernier est un beau bébé de plus de 640 pages et voici ce que j’en ai pensé…

[NB: Encore une fois, je remercie vivement Gilles Dumay et sa générosité à toute épreuve. Avec cet envoi, il a voulu me faire découvrir un titre qui lui a procuré un coup de coeur. J’apprécie beaucoup la volonté!]

« Au fond, tentait de se rassurer Célérya, être homme de guerre ou homme de pouvoir n’est peut-être pas chose si difficile: pour accomplir de hauts faits, il suffirait d’être largement dépourvu de ce qu’on a coutume d’appeler le sens commun.»

Un univers étonnant mais à l’installation confuse

Pour ceux qui ont suivi mes update lectures, vous savez que La marche du levant n’aura malheureusement pas été un coup de coeur comme l’espérait son éditeur, et qu’il m’aura fallu plus d’une semaine pour arriver au bout d’un titre qui, à mon rythme normal de lecture, aurait du être lu en 4/5 jours maximum. Lecture difficile donc et que j’ai pensé à abandonné plusieurs fois mais à qui j’ai voulu donner sa chance jusqu’au bout. Pourquoi? Parce que son univers est vraiment intéressant. Avec cette Terre qui met 300 ans à tourner sur elle-même et ce soleil qui se traîne, Léafar Izen nous offre un monde étonnant où l’humanité, coincée entre un front de glace et un désert aride, est nomade par obligation de survie. Cette société mobile est passionnante à découvrir et mérite de l’intérêt tant son organisation est complexe et originale. Mais malheureusement, son installation pour le lecteur est aussi très confuse. On passe d’un lieu à l’autre sans saisir où l’on se trouve (l’absence de cartes est vraiment problématique) et on ne comprend pas vraiment l’organisation de ce monde, surtout dans le début du roman mais aussi, à mon grand regret, dans le développement de l’histoire. Ajoutons à cela une intrigue qui peine à démarrer pendant 200 pages et l’abandon n’était pas loin… La critique de L’ours inculte m’ayant préparé à cette installation confuse et au démarrage tardif de l’intrigue, j’avais déjà décidé d’atteindre 200 pages pour savoir si, oui ou non, je me devais de poursuivre. Cela fut en effet moins pénible par après, l’action prenant enfin son essor, mais l’enthousiasme ne m’a, malheureusement, jamais atteint tout à fait. J’ai poursuivi, malgré tout, par intérêt pour cet univers et par curiosité envers la fin qu’on m’avait annoncé surprenante.

« La terre entonnait son printemps comme un chant nuptial et s’offrait toute entière. Et, pour celles et ceux qui allaient sous le Levant, sans attaches et sans demeure, les nuages composaient dans le ciel la partition d’une symphonie prometteuse.»

Des longueurs et des personnages trop lisses 

Si j’ai eu du mal à accrocher à La marche du levant, cela tient en partie aux personnages. Trop lisses, trop archétypaux, aucun ni aucune ne m’aura vraiment convaincu tout à fait (en particulier le « méchant » du premier chant, sans relief). Cet aspect, couplé à une intrigue souvent encombrée de longueurs, a fait de cette lecture un effort pas forcément agréable alors même que le roman n’est pas mauvais… Passées les 200 premières pages fort laborieuses, l’intrigue de ce roman tend pourtant à gagner un peu en rythme à mesure que les années passent. Mais le rythme manque pour moi cruellement de stabilité et continue de s’accompagner d’un certain fouillis déstabilisant. On alterne ainsi entre des passages d’une lenteur morne qui m’ennuyaient profondément et des scènes exaltantes qui me raccrochaient à la lecture, le combat superbe d’Oroverne en tête. Mais voilà, alors même que j’appréciais l’élégance de l’écriture, le foisonnement de son univers et que j’étais curieuse de voir arriver l’épilogue final, je n’ai jamais vécu cette lecture avec enthousiasme. J’ai finalement triché un peu sur les 150 dernières pages, passant de nombreux passages en diagonale, lâchant finalement l’affaire. Et si la fin était en effet surprenante, j’avais épuisé ma capacité à apprécier le roman et ça n’aura pas suffit à avoir eu le sentiment d’avoir bien fait de m’accrocher… Ce n’était pas pour moi, ça arrive. C’est jamais agréable mais ça arrive. 

En bref, La marche du levant est un roman qui ne m’aura pas enthousiasmé et que j’ai eu grande peine à finir. Pourtant intéressant, ne serait-ce que pour le développement d’un univers étonnant et passionnant à découvrir, l’installation confuse du monde et de l’intrigue et les longueurs auront eu raison de moi. Dommage. Mais d’autres ont un avis plus positifs pour vous convaincre: L’ours inculte, Le Chien critique, Les blablas de Tachan, Les lectures du Maki.

« Une Terre au ralenti. Une héroïne déterminée. Une épopée inoubliable.

Trois cents ans. C’est le temps que met la Terre pour tourner sur elle-même. Dans le ciel du Long Jour, le soleil se traîne et accable continents et océans, plongés tantôt dans une nuit de glace, tantôt dans un jour de feu. Contraints à un nomadisme lent, les peuples du Levant épousent l’aurore, les hordes du Couchant s’accrochent au crépuscule.

Récemment promue au rang de maître, l’assassine émérite Célérya accepte un enrôlement douteux dans le désert de l’est. Là, sans le vouloir, elle contribue à l’accomplissement d’une prophétie en laquelle elle n’a jamais cru.

Un domino vient de tomber ; les autres suivront-ils ? »

(Illustration de couverture: © Hervé Leblan)

[Lecture n°59/60 (pour l'échelon 4) pour le Challenge de Littérature de l'Imaginaire édition 8 de Ma lecturothèque]