Les Soeurs Carmines. Tome 2, Belle de gris

Après avoir eu un bon gros coup de coeur pour le premier tome de la trilogie des Soeurs Carmines d’Ariel Holzl, intitulé Le complot des corbeaux, c’est avec une excitation et une impatience démesurées que je me suis plongé dans le second volume. Ce dernier s’appelle Belle de gris et il vient d’être publié il y a peu dans la collection Naos des éditions Mnémos. Voici ce que j’en ai pensé…

[NB: Je remercie vivement les éditions Mnémos, et notamment Nathalie Weil, pour cet envoi, pour leur confiance et pour leur humour!]

Du mépris à l’amour

Chaque tome de la trilogie des Soeurs Carmines suit l’une des trois soeurs, le premier suivait Merryvère, la voleuse maladroite, le dernier suivra la petite Dolorine (mon chouchou) et Belle de gris s’intéresse donc à Tristabelle, la soeur aussi garce que belle, la plus cinglante et la plus pimpante. S’agissant de celle qui m’avait le moins accroché dans le tome 1, je craignais un peu de devoir la supporter tout le long d’un volume. Et pourtant, quand Tristabelle décide de vous persuader que vous allez l’aimer, vous finissez inévitablement par tomber sous le charme. Bon d’accord, sa façon de charmer est particulière… Elle décide en effet de prendre le contrôle de la narration, car qui mieux qu’elle pour parler d’elle, et s’adresse ainsi régulièrement au lecteur directement en l’insultant souvent copieusement. Et je ne sais pas si j’ai des tendances masochistes, mais j’ai adoré ça! Le ton n’en est que plus cynique encore que dans Le complot des corbeaux. J’ai adoré cette façon de bouleverser la narration habituelle en nous prenant à partie. Et lorsqu’on suit d’autres protagonistes, c’est parce que Tristabelle a décidé de nous renvoyer et on ne désobéit pas à Trista! Ingénieux. Mais ce n’est pas vraiment à coups d’insultes, ni même en admirant sa cruauté et sa vanité à toute épreuve que je suis tombée sous son charme (même si son sadisme m’aura fait mourir de rire), tout est arrivé sur un revirement inattendu qui a crée en moi une émotion forte et une empathie sincère à son égard. Comme quoi… tout le monde finit vraiment par aimer Tristabelle! 

« Avant que je n’oublie, néanmoins, sachez que vous m’avez bien mal jugée: si cela tenait à mon bon vouloir, jamais je ne ferais envoyer qui que ce soit aux mines de sel pour avoir porté du blanc en hiver! 

Ce serait si… idiot. Patauger dans le sel éclaircirait davantage leurs teints et leurs tenues; quand elles reviendraient des mines, tout serait à recommencer.

Non, franchement, pour leur apprendre les rudiments de la haute couture, mieux vaudrait les écorcher vive et faire de leur peau des manteaux distingués. En toute simplicité. »

Dentelle ensanglantée

Si l’univers est toujours aussi sombre et décalé, nous avons cette fois un autre point de vue, celui des coups bas entre deux couches de maquillage et des meurtres et complots en dentelle. Et croyez-moi, c’est sans doute beaucoup plus sauvage et dangereux que ce que vous pouvez imaginer! Mettez des héroïnes de Jane Austen avec des dagues en main et vous obtiendrez un beau bain de sang. Et rien ne me remplit plus de joie que des jeunes pimbêches qui se massacrent entre elles (comment ça Tristabelle aurait déteint sur moi?!!). Si l’histoire est, en apparence seulement, un peu plus futile que celle du premier tome, j’ai encore une fois été pleinement happé par l’intrigue et ses rebondissements. Certes, le rythme est moins effréné que pour le premier tome, et la surprise de la découverte de l’univers n’est plus là, mais le tome 2 n’est pas en reste en terme de nouveautés lui aussi. On y apprend notamment enfin des choses sur les origines des trois soeurs! Et il y a aussi beaucoup d’éléments d’intrigue du premier tome qui trouvent ici un prolongement à mon plus grand plaisir (je n’en dirai pas plus pour ne pas spoiler, mais certaines relations sont plutôt les bienvenues). Mon seul regret? La quasi absence de Dolorine dans cette histoire! J’aime terriblement ce personnage mais je me rassure en me disant que j’aurai tout un tome pour la suivre très prochainement et ça, ça me remplit de joie!!! Donc vite, vite, le tome 3!

« - Vous avez déclenché une émeute… pour une paire de chaussures? 

Je lui lance un regard perplexe.

- N’est-ce pas la meilleure des raisons? On voit bien que vous ne faites pas souvent les soldes… »

En bref, je suis tombée sous le charme de Tristabelle! Comme quoi, à coups d’insultes répétées, d’auto-suffisance et de leçons de beauté pleines de sarcasmes, on finit par aimer quelqu’un. Encore un tome grinçant et absolument génial qui ne fait que me confirmer que je ne peux plus me passer de cet univers et de cette famille Carmines! 

« Trois semaines séparent Tristabelle Carmine du Grand Bal de la Reine. Trois semaines pour trouver la robe de ses rêves, un masque, une nouvelle paire d’escarpins… et aussi un moyen d’entrer au Palais. Car Tristabelle n’a pas été invitée. Mais ça, c’est un détail. Tout comme les voix dans sa tête ou cette minuscule série de meurtres qui semble lui coller aux talons.

En tout cas, elle ne compte pas rater la fête. Quitte à écumer les bas-fonds surnaturels de Grisaille, frayer avec des criminels, travailler dans une morgue ou rejoindre un culte. S’il le faut, elle ira même jusqu’à tuer demander de l’aide à sa petite sœur. Car Tristabelle Carmine est une jeune femme débrouillarde, saine et équilibrée. Ne laissez pas ses rivales ou ses admirateurs éconduits vous convaincre du contraire. Ils sont juste jaloux. Surtout les morts. »

(Illustration de couverture : © Melchior Ascaride)