Les Cités englouties

Paru en 2012 puis en version française en 2013 aux éditions Au Diable Vauvert, Les Cités englouties est un roman de Paolo Bacigalupi. Devenu un auteur à surveiller en science-fiction depuis son premier roman multi-primé La Fille automate (prix Hugo, Nebula, Locus, Campbell, etc.), Paolo Bacigalupi signe ici un roman entrant dans sa série des Ferrailleurs de mers. Il est également paru en édition poche chez J’ai lu.

Bien pensé et haletant mais un peu décevant. J’avais véritablement beaucoup aimé La Fille automate, son premier roman, très élaboré, exotique et faisant naître de nombreuses réflexions quand à nos façons de vivre et à ce que l’avenir pourra nous réserver. C’était original, fort bien écrit et très immersif. Et c’est sans doute pourquoi j’ai imposer trop d’attentes à ces Cités englouties et en suis ressorti légèrement déçue malgré un très grand plaisir ressenti à sa lecture. 

Soyons clairs, c’est un bon livre, très bien écrit, une science-fiction d’anticipation bien pensée et haletante avec des personnages touchants et intrigants. J’ai simplement trouvé l’univers moins immersif et moins élaboré dans le détail, comme ressentant une difficulté de l’auteur à accoucher de son histoire. Même si l’idée de cet avenir est bien pensée et ressemble sur certains critères à celui de La Fille automate, notamment sur l’aspect écologique, on n’y plonge pas suffisamment.

« - Meute, dit le mi-bête. Il fait partie de ta meute. 

A la manière dont il prononça ces mots, Mahlia comprit qu'il s'agissait pas seulement de courir et de chasser ensemble comme les chiens et les coyloups. Il s'agissait de quelque chose d'absolu, de total.

- Oui, dit-elle. Ma meute. »

J’ai malgré tout dévoré sa lecture assez rapidement, et ce, en grande partie, parce que l’histoire est dynamique et le destin des trois personnages principaux captivant. Nous suivons Malhia, jeune fille très étonnante, survivante par excellence, Mouse, jeune homme profondément gentil et humain mais plongé dans un monde pour lequel il n’est pas censé être fait & Tool, homme-bête, féroce et en même temps tellement juste, plus sage que la plupart des humains. Paolo Bacigalupi a ce don de décrire des personnages atypiques qu’on arrivera difficilement à oublier parce qu’on s’y attache profondément. Ils évoluent au fur et à mesure de leur histoire, ils sont complets et complexes, et ils sont la saveur essentielle de ce récit qui, sans la perspective humaine qu’ils apportent, deviendrait bien fade malgré un rythme d’action intense et ininterrompue. 

« Née dans un autre endroit, à un autre moment [...], elle se serait sans doute intéressée aux garçons, aux fêtes et aux vêtements à la mode. Au lieu de ça, elle arborait des cicatrices, un moignon à la place de la main droite, des yeux aussi durs que l’obsidienne, et le sourire hésitant que ceux qui n’attendent que douleur de l’instant à venir. » 

On appréciera le travail de réflexion qui est fait à propos de l’humain dans son côté le plus bestial. Ici, le monde transforme les jeunes enfants les plus classiques en machines à tuer, nourrit de fausses espérances bombardées par des hommes inaccessibles, ce qui n’est pas sans évoquer notre actualité malheureuse. L’auteur sait mettre en lumière nos travers et nos faiblesses, mais jamais sans oublier nos bons côtés, comme l’altruisme illustré par la quête de nos héros. Paolo Bacigalupi dilue des gouttes d'espoir dans un océan d'horreurs.

En bref, Les Cités englouties est une bonne petite SF, accessible aux non-initiés du genre, une histoire captivante, aux personnages savoureux. Mais si vous voulez vraiment apprécier le talent de Paolo Bacigalupi, lisez d’abord La Fille automate. 

« Dans une Amérique en plein chaos, où la guerre est omniprésente et les enfants transformés en machines à tuer, deux orphelins vivent à l’écart d’un village, protégés des maltraitances par leur amitié et le vieux médecin qui les a recueillis. Au cours d’une exploration, ils rencontrent Tool, un homme génétiquement modifié pour la guerre, mercenaire aujourd’hui fugitif réfugié dans la jungle. Avec lui, nos deux jeunes héros vont être placés devant un choix crucial, un choix qui va transformer leur destin : se sauver soi-même, ou sauver la vie de celui qui a sauvé la vôtre ? Un choix qui va emporter nos héros dans une puissante histoire de loyauté, de survie, et finalement, d’espoir. »