La maison des jeux. Tome 1, Le serpent

Le 24 mars dernier, les éditions Le Bélial’ publiaient un nouveau titre inédit dans la collection Une Heure-Lumière: Le serpent de Claire North (pseudonyme de l’autrice Catherine Webb). Premier volume d’une trilogie de novella intitulée La maison des jeux, Le serpent est traduit par Michel Pagel et semble faire l’unanimité. Voici ce que j’en ai pensé…

[NB: Un grand merci aux éditions de Le Bélial’ pour cet envoi surprise!]

« Miseriez-vous votre bonheur? Joueriez-vous votre amour-propre? Au nom du ciel, ne jouez pas pour le plaisir, pas encore ; pas alors qu’il existe tant d’enjeux moins importants en lesquels investir!»

Une partie d’échecs de haut vol

Le serpent nous raconte l’histoire de Thene, femme bafouée qui développe rapidement des capacités de joueuse hors-pair au sein de la Maison des jeux de Venise où son mari l’emmène assister à la perte de toutes leurs économies. Comme d’autres joueurs et joueuses de talent, elle se voit proposer une invitation à la Haute Loge à la condition de remporter une partie où les pions ne sont plus de simples pièces de jeu et où l’échiquier est le destin de Venise toute entière. Un jeu plus audacieux, aux règles plus tacites et où presque tous les coups sont permis. Plus d’enjeux, plus de risques qui font de cette partie un jeu de haut vol et de cette novella, une oeuvre précise, construite avec finesse qui nous tient en haleine et nous envoûte complètement. Claire North nous propose un récit aussi maîtrisé que passionnant aux rebondissements nombreux qui reflètent toute l’intelligence de son intrigue. L’aspect imaginaire de ce texte, parsemé au coeur de cette partie d’échec politique de haut vol, est léger mais central et il appuie un peu plus sur la fascination exercée par cet univers sans prendre pour autant le pas sur la logique et la précision du jeu. J’ai été soufflée par la qualité de cette intrigue!

« Prenez garde à ne pas vous perdre trop profondément dans le jeu. L'émotion est une faiblesse, mais les joueurs restent humains ; les pièces aussi ; si vous oubliez le sens de l'amour ou de la peur, vous ne verrez plus le plateau clairement.»

Une narration maligne

Claire North parvient à nous captiver, non seulement par l’intelligence de sa construction narrative mais aussi par son écriture. Précise, sa plume nous dépeint une Venise vivante et vibrante où chaque personnage croisé, même secondaire, a de l’épaisseur et une existence propre. L’autrice nous offre un microcosme social fascinant qui favorise d’autant plus la tension autour du jeu, et elle y glisse quelques messages intéressants sur la manière de conquérir sur un échiquier politique, sur la considération des femmes ou des gens des classes moins favorisées. Elle rend notre implication totale en proposant une narration qui interpelle le lectorat et l’inclut continuellement dans l’observation des coups et des personnages/pièces de jeu. Ce procédé, qui peut être déroutant ou déjà-lu, n’est pas anodin mais détient ici un sens véritable qui apporte un petit plus à cette novella. Je n’ai absolument rien à reprocher à ce texte qui figure en bonne place aux côtés de mes préférés de la collection et qui m’a emporté dans cette réalité étrange et ce Venise sous haute tension de la première à la dernière ligne. Il me tarde désormais de découvrir la suite de cette trilogie (bien qu’une histoire se conclue effectivement ici) pour être à nouveau ébahie par le talent de Claire North et envoûtée par son univers. 

En bref, Le serpent, premier opus de La Maison des jeux est une grande réussite! L’intrigue, brillante, intelligente et finement construite nous propose un jeu aussi fascinant que tendu. Avec sa narration incluant le lecteur et son écriture très vivante, l’autrice nous immerge pleinement dans cette Venise d’intrigues pleine de vie et de couleurs. Un coup de coeur.

« Venise, 1610.
Au cœur de la Sérénissime, cité-monde la plus peuplée d’Europe, puissance honnie par le pape Paul V, il est un établissement mystérieux connu sous le nom de Maison des Jeux. Palais accueillant des joueurs de tous horizons, il se divise en deux cercles, Basse et Haute Loge. Dans le premier, les fortunes se font et se défont autour de tables de jeux divers et parfois improbables. Rarement, très rarement, certains joueurs aux talents hors normes sont invités à franchir les portes dorées de la Haute Loge. Les enjeux de ce lieu secret sont tout autre : pouvoir et politique à l’échelle des États, souvenirs, dons et capacités, années de vie… Tout le monde n’est pas digne de concourir dans la Haute Loge. Mais pour Thene, jeune femme bafouée par un mari aigri et falot ayant englouti sa fortune, il n’y a aucune alternative. D’autant que l’horizon qui s’offre à elle ne connaît pas de limite. Pour peu qu’elle gagne. Et qu’elle n’oublie pas que plus élevés sont les enjeux, plus dangereuses sont les règles…»

(Illustration de couverture : © Aurélien Police)

D’autres avis dans la blogosphère: L’épaule d’Orion, Le nocher des livres, Les lectures du Maki, Au pays des cave trolls, Elbakin, Le bibliocosme, Un dernier livre avant la fin du monde, Les chroniques du chroniqueur, Ombre bones, De l’autre côté des livres, …

Tome 3 - The master - à paraître en VF

[Diversité: pp juif.ve]

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[Lecture n°32/108 (pour l'échelon 5 Synchronisation avec la page) pour le Challenge de L'Imaginaire édition 10 de Ma lecturothèque]