La Cité de l'orque

Publié aux Etats-Unis en 2018, La Cité de l’orque est le premier roman adulte de l’auteur Sam J. Miller. Il sort le 30 janvier prochain chez Albin Michel imaginaire et avec sa couverture sublime réalisée par Aurélien Police et un résumé plutôt intriguant, il ne pouvait que me donner envie. Voici donc ce que j’en ai pensé…

[NB: Merci aux éditions Albin Michel imaginaire pour leur confiance réitérée et pour l’envoi de cet ouvrage. Merci aussi à Eva pour le petit mot.]

« La vie est beaucoup plus facile à vivre lorsque vous reconnaissez que votre ignorance dépassera toujours votre savoir de quelques longueurs. »

Un Blade Runner sur l’océan polaire

L’univers dystopique post-effondrement écologique de ce roman est vraiment intéressant. Que ce soit sur les causes ayant mené à l’état du monde ou la description de la ville de Qaanaaq et son fonctionnement, l’univers proposé par Sam J. Miller est riche et assez passionnant. Il évoque effectivement une sorte de Blade Runner sur l’eau avec sa multitude d’êtres délaissés, sa pauvreté et ses maladies et bien sûr les implications technologiques importantes. Cette ville pleine de câbles, de bruits constants, de fumées et de désespoir nous rappelle les quartiers du film de Ridley Scott avec l’aspect glacial de sa position géographique en plus. Mais j’aurai apprécié que l’univers soit plus creusé encore, plus expliqué pour mieux s’y immerger et mieux le visualiser. D’autant que l’ambiance si particulière nous donne envie de mieux imaginer le décor. Mais on visualise malheureusement peu l’ensemble de Qaanaaq qui se dévoile seulement progressivement à nous dans le texte sans parvenir à en saisir l’ensemble. La société décrite est cependant très intéressante et soulève beaucoup de questionnements sur l’égalité des chances, l’abus de pouvoir et le rejet de la différence.

« Les récits: c’est en eux que nous nous retrouvons, que nous rejoignons ceux qui nous rassemblent. Si tu recueilles des récits en nombre suffisant, tu sortiras bientôt de la solitude - tu es légion. »

Une absence de repères perturbante

Au début de ma lecture, j’étais assez dubitative. L’auteur nous abreuve de notions, d’éléments, mais sans les expliquer immédiatement. Or, la plupart ne m’évoquait rien, me laissant perdue, sans repère pour saisir les événements. J’ai donc eu du mal à accrocher car certains éléments sont expliqués assez tardivement. Le fait que le personnage de Soq soit décrit à la troisième personne du pluriel a ensuite ajouté à le confusion et ce, à mon sens, inutilement. Heureusement, le mystère de la femme à l’orque tout juste évoquée au départ m’a tout de suite envoûté. Les révélations ensuite, et la clarification des éléments m’ont permis de mieux accrocher à l’histoire. Malheureusement, le récit est construit de manière assez alambiquée,  cassant le rythme en coupant les actions par des ellipses et le recours à une autre forme narrative pour rapporter les événements de façon factuelle et éloignée. Cela aura freiner en plein élan mon immersion jusqu’à un final un peu décevant lui aussi. Je regrette aussi une psychologie des personnages un peu trop survolée à mon goût, surtout dans leurs évolutions pas toujours crédibles ou compréhensibles pour moi.

En bref, je suis assez frustrée parce qu’il y a d’excellents ingrédients dans ce livre mais qui sont, à mon sens, pas assez exploités. Un peu plus de background, un peu plus d’attachement aux personnages et une structure narrative moins déroutante et j’aurai passé une fabuleuse lecture tant l’univers m’intrigue et l’histoire de base me plaît.

« 22ème siècle. Les bouleversements climatiques ont englouti une bonne partie des zones côtières. New York est tombé; les États-Unis ont suivi. Au large de pays plongés dans le chaos, ou en voie de désertification, de nombreuses cités flottantes ont vu le jour. Régies par des actionnaires, elles abritent des millions de réfugiés. C'est sur Qaanaaq, l'une de ces immenses plateformes surpeuplées, qu'arrive un jour, par bateau, une étrange guerrière inuit. Elle est accompagnée d'un ours polaire et suivie, en mer, par une orque. Qui est-elle ? Est-elle venue ici pour se venger ? Sauver un être qui lui serait cher ? »

(Illustration de couverture: © Aurélien Police)

> Lire un extrait < (© Albin Michel imaginaire)

[Lecture n°8/36 (pour l'échelon 3) pour le Challenge de Littérature de l'Imaginaire édition 7 de Ma Lectorutothèque]