Kid Wolf et Kraken Boy

Sorti fin mai aux éditions Le Bélial’, Kid Wolf et Kraken Boy est un texte de Sam J. Miller, auteur que j’avais découvert, et apprécié, avec La cité de l’orque. Cette sortie s’inscrit dans la collection Une Heure-Lumière sous une traduction de Michel Pagel. Et voici ce que j’en ai pensé…

« On est à New York, chuchota-t-elle. Il y a ici des gens venus de toutes les nations de la Terre. Nous n’avons pas besoin de vieux types à l’esprit fermé pour nous donner du pouvoir. Nous pouvons créer le nôtre.»

Une romantasy queer inattendue

Je ne sais pas si c’est le résumé qui laisse place au doute ou bien l’esthétique de la couverture mais je ne m’attendais pas tout à fait à lire une romantasy LGBT en me lançant dans Kid wolf et Kraken boy. Et lors même que je suis allergique à la romance, on peut dire que c’est une excellente surprise ! Parce que l’univers boxe, gangs de criminels, aux relents de sueur et de masculinité, sur le papier, ça ne m’attirait pas. Mais ça tombe bien parce que ce n’est pas du tout ce que contient ce court roman ! Sam J. Miller nous propose habilement un détournement de ce monde généralement assez toxique et masculiniste en intégrant des personnages qui sortent de ce cadre. Tout d’abord une femme aux ficelles. Une femme aux ambitions sociales fortes, aux stratégies remarquables et à la personnalité fascinante. Mais aussi et surtout nos deux protagonistes principaux, deux jeunes hommes un peu pommés, cherchant à s’extraire de ce que la société leur réserve (c’est-à-dire fort peu), l’un complètement assumé hors du spectre du gars fort et dans son homosexualité et l’autre en parfaite ambiguïté entre l’image de la boxe et son désir pour les hommes. Il y a en eux des différences mais un orgueil commun, une rage d’en découdre, une sensibilité puissante que l’auteur parvient parfaitement à retranscrire et une soif de l’autre magnifique. Et moi, l’anti-romance, j’ai été convaincue par leur histoire et plutôt émue de ce qui pouvait leur arriver. C’est une grande réussite !

« Quand on encre quelqu’un, on se retrouve à jamais lié à cette personne - et à quiconque elle-même est liée. »

Une proposition originale entre urban fantasy et uchronie

Sam J. Miller m’avait prouvé dans son roman qu’il avait de belles idées et de l’originalité à revendre. Dans ce court récit, il nous propose non seulement un ancrage historique où s’insuffle la magie, dans un système plutôt original à travers des glyphes et tatouages, mais également un début d’uchronie riche et surprenant que je n’avais pas anticipé lui non plus. Son imaginaire s’insère assez logiquement dans la réalité (bien qu’il manque peut-être de limitations tant les possibilités semblent hallucinantes) et permet de faire évoluer notre monde vers une version alternative très intéressante. Kid Wolf et Kraken Boy fut donc riche en bonnes surprises, proposant un récit au background bien pensé et des personnages magnifiquement écrits auxquels on s’attache. L’intrigue mêle parfaitement émotions, tension et révélations pour un rendu très accessible et très efficace en termes de plaisir avec une petite richesse en fonds qui n’est pas pour me déplaire. C’est un récit qui a la rage d’un uppercut et la douceur d’une caresse (ouais je fais des citation dignes d’un bandeau rouge!). Un excellent combo! Je n’ai qu’un regret sur le final qui, par un élément, annule le petit côté féministe du début de l’intrigue. Mais je conçois sa logique malheureusement.

En bref, j’ai adoré ma lecture de Kid Wolf et Kraken Boy qui constitue un récit surprenant, tant dans son style, mêlant urban fantasy, uchronie et romantasy, mais aussi dans son exécution. Avec un système de magie original, des personnages bien écrits, de l’émotion, de la tension et une ambiance globale maîtrisée, c’est un court récit très intense qu’on dévore sans peine. Une excellente surprise.

« New York. Fin des années 1920.
L’un est le Kid Wolf, jeune boxeur talentueux qui rêve de soulever la ceinture de champion. L’autre est le Kraken Boy, le plus doué des tatoueurs, un grand type nonchalant dont l’art et l’encre font merveille — littéralement. Mais les temps sont durs dans le Lower East Side de l’entre-deux-guerres gangréné par la mafia juive. D’autant que la Grande Dépression pointe son nez, et avec elle les mouvements sociaux qui se radicalisent et les briseurs de grève aux mains des syndicats qui font régner la terreur… Et puis il y a Hinky Friedman, née Rivkah Heinckmann, alias Rebecca-la-Hink, la Reine des Gangsters. Et Hinky a une vision, l’ambition d’un autre monde — meilleur, qui sait ? Or pour cela elle a un plan, un plan pour Kid Wolf et Kraken Boy, un plan pour tout changer. Mais ce que n’a pas prévu Hinky, c’est l’amour. Un amour impossible, interdit, un amour qui, lui, pourrait véritablement remodeler la face du monde…»

(Illustration de couverture: © Aurélien Police)

[Diversité: pp gay, pp juif.ve, ps juif.ve, ps lesbienne]

> Content warning <

- Livre reçu en service presse. Publication non rémunérée. Merci aux éditeurs. - 

D’autres avis dans la blogosphère: Le Syndrome Quickson, De l’autre côté des livres, Au pays des cave trolls, L’épaule d’Orion, …

[Pumpkin Autumn Challenge 2024 - Tableau Automne Douceur de vivre - Catégorie Je crois bien n’avoir songé qu’à vous seule: orgueil - préjugé - amour]

[Lecture n°36 (46/60 points avec les bonus pour l'échelon 4 Fusion dans l’utopique) pour le Challenge de L'Imaginaire édition 12 de Ma lecturothèque]