J'agonise fort bien, merci.

Deuxième roman d’Oren Miller, après Le Roi Sombre, paru aux éditions de l’Homme sans nom (que je salue pour leur côté passionné et passionnant), J’agonise fort bien, merci, est sorti ce 14 avril 2016. Comme il promet de mêler folklore de ma Bretagne natale avec enquête haute en couleurs, il m’était impossible de ne pas craquer dessus et je l’ai acheté dès sa sortie!

[NB: il n’y aura pas de spoiler dans cette critique, pour ne pas vous gâcher la lecture.]

Fantastiquement fantasque et surprenant! Décidément, les coups de coeur sont nombreux pour ce mois d’avril en matière de lecture, et c’est tant mieux. Tout d’abord, on craque forcément pour ce titre intriguant, glauque et fantasque à la fois, tout comme l’écriture de l’autrice. Ensuite, la couverture sublississime d’Emile Denis finit d’envoûter le lecteur qui ne peut s’empêcher d’ouvrir ce roman. Oren Miller propose alors un mélange subtile et surprenant de légendes bretonnes (à coups de fées Margot, de lavandières de nuit et autres fées du foyer) et d’enquête aux rebondissements infinis. Que du bonheur !

« - Mon ami, je crois qu’il est arrivé quelque chose de grave à Catherine.

- Oui, elle est morte, la mort c’est très grave en soi.

- Je pense qu’elle a été assassinée.

- Ah oui ça c’est plus grave… »

Ce qui frappe, lorsqu’on lit pour la première fois un écrit d’Oren Miller, c’est la maîtrise d’une écriture riche et voluptueuse. C’est une plume très agréable à lire, sublimant toujours de sa maîtrise, les mots et les syntaxes. Mais le plaisir ne s’arrête pas à la forme, puisque le fond, d’abord intriguant, finit par captiver complètement. Cette enquête étonnante dans les années 50 en Bretagne m’a tout simplement bluffé sur plusieurs aspects, comme le faisait si bien Agatha Christie (que l’on prend même plaisir à croiser…). Je ne vous en révélerais rien ici (pour ne pas gâcher la surprise) mais j’ai réellement apprécié que l’autrice, via ses personnages, se joue de nous et nous amène à croire à des choses pour finalement nous dérouter complètement.

« Cet étrange phénomène naturel consistait en une colonie de sporophores pérennants alignés en une formation plus ou moins circulaire qu’on trouvait généralement en sous-bois ou dans les prés. Il était annonciateur de grands bouleversements, car il était la trace visible de la tenue d’un conseil de fées. Et il était bien connu des initiés que les fées ne tenaient jamais conseil pour des questions sans importance. »

Outre tous ces points très positifs, j’ai eu un réel coup de coeur pour Evariste Fauconnier, le notaire et un des personnages principal de ce duo improbable d’enquêteurs. Il est pinçant, drôle, charismatique et si décalé, qu’après avoir dépassé les premières interrogations que son personnage m’a posé, j’ai finit par l’adorer sans concession. Il m’a évoqué un peu le fantasque Sherlock Holmes à sa façon. Entre Hercule Poirot et Holmes, Fauconnier à définitivement sa place.

« - Ne diabolisez pas ce que vous ne connaissez pas, je vous en prie.

- Rassurez-vous, mon père, je sais d’expérience que le diable se cache dans ce que nous connaissons le mieux. »

Et enfin, quel plaisir immense j’ai eu d’entendre parler de lieux que je connais, de légendes que j’ai adoré étudié dans ma jeunesse et de cette ambiance et de ce climat capricieux qui font tout le charme d’une région qui me manque et que j’ai retrouvé un peu entre ces lignes. Merci Oren Miller et merci l’Homme sans nom, pour ces retrouvailles. Seul petit bémol (mais vraiment pour chipoter) quelques coquilles se sont glissées dans le texte qui m’ont parfois fait buter dans mon immersion (ex: « […] sur les côtés de son du visage. ») Mais je passe outre, tellement l’ensemble est superbe. Et j’aurai également préféré avoir les représentations illustrés des personnages à la fin, pour les rencontrer uniquement par les mots avant de voir leur image (mais c’est un détail aussi).

En bref, gros coup de coeur pour ce roman policier et fantastique, drôle et mystique, envoûtant et haletant. N’hésitez pas à la découvrir !

Pour lire les premières pages, cliquez ici. 

« Sainte-Marie-La-Grise. Son cadre exceptionnel près de la côte d’émeraude en fait une destination de vacances des plus prisée. De magnifiques paysages, un mystérieux folklore breton et des morts qu’on a aidés à trépasser raviront les plus aventureux d’entre vous. 

Profitez de l’hospitalité chaleureuse des habitants qui sauront vous mettre à l’aise.

Afin d’apprécier pleinement votre séjour, veillez cependant à respecter trois règles :

1 Écoutez toujours les murmures de ceux que vous ne voyez pas.

2 Gardez-vous des créatures sinistres qui frappent avant d’entrer.

3 Soyez sage. Très sage. »