Dreamblood. Tome 1, La lune tueuse

Publié en anglais en 2012 puis traduit pour une publication chez Pygmalion en début d’année 2023, La lune tueuse est le premier tome du diptyque Dreamblood de N.K. Jemisin. C’est dans sa version audio, chez Gallimard écoutez lire que j’ai découvert ce titre avec une narration d’Eve Reinquin. Et voici ce que j’en ai pensé…

« Savais-tu que coucher les histoires par écrit les tue ?»

La richesse de l’univers

Après avoir été conquise par la richesse de son imaginaire et l’intensité de sa narration dans des œuvres aussi différentes que Les livres de la Terre Fracturée ou Genèse de la cité, j’avais très envie de découvrir un autre pan des écrits de N.K. Jemisin à travers, cette fois, un récit de fantasy politique aux contours égyptiens. La lune tueuse nous embarque dans un univers effectivement très riche, où chaque strate de la société a été pensée et pesée dans une construction de monde global dense et cohérente. Il s’agit alors de s’accrocher dans les débuts de notre découverte pour ne pas s’égarer en chemin. Et de profiter de l’originalité, encore une fois chez l’autrice, du système magique qu’elle tisse ici. Magie qui n’est pratiquée que sous le poids des règles d’une coutume, d’une religion et par une poignée de personnages à la lourde responsabilité. C’est cet aspect qui permet à N.K. Jemisin de venir porter des réflexions sur la foi, sur les jeux de pouvoir aussi en confrontant des personnages à leur croyance et à leur certitude au fur et à mesure de l’intrigue. Elle nous offre par ailleurs des personnalités complexes, écrites avec toute la nuance de leurs aspérités et dont les confrontations entre eux les feront évoluer.

« Accepte l'amour tant qu'il es à ta portée, prêtre - d'où qu'il vienne, approprié ou non, tant qu'il dure. Car toujours, toujours il finira.»

Mais un manque d’entrain global

Là où le bas blesse cependant, c’est que dans cet univers profondément complet, au système de magie très original, et malgré des personnages denses et bien écrits, l’intrigue souffre elle d’un certain manque de souffle. Non seulement, le manichéisme de l’ensemble reste assez stéréotypé, lissant les formidables nuances du roman, mais l’histoire peine également à avancer à bon rythme, s’enlisant avant un final plutôt bon et sous tension pour lequel il faut avoir réussi à s’accrocher avant. Je vous avoue que j’ai peiné à terminer cette écoute et que j’ai pensé abandonné, si ce n’est que N.K. Jemisin est pour moi devenue une valeur sûre qui a toujours su me surprendre. Je ne regrette absolument pas d’avoir fini ce premier tome, qui par ailleurs ne nous laisse aucunement frustré dans son final et pourrait se suffire à lui-même. Mais je crains de ne pas avoir envie de lire la suite malgré toutes les qualités qu’il peut offrir. On sent aussi que ce roman a été écrit avant Les livres de la terre fracturée et que l’écriture avait encore à s’affirmer avant de prendre pleinement son identité bien qu’on décèle déjà ici les immenses qualités de l’autrice. Je suis juste un peu passée à côté…

En bref, ce premier volume de Dreamblood est un bon roman de fantasy. Son univers est riche, son système de magie original, ses personnages magnifiquement écrits et nuancés et les jeux de pouvoir et questionnements soulevés sont maîtrisés. J’ai cependant regretté une intrigue trop manichéenne et au rythme inégal qui m’aura un peu fait lâcher en chemin. On sent ici un texte encore timide écrit avant sa saga formidable qui déployait toute la richesse du talent de l’autrice.

« Dans l’ancienne Cité-État de Gujaareh, la paix est la seule loi. Sur les toits et parmi les ombres des rues pavées attendent les collecteurs, gardiens de cette paix. Serviteurs de la Déesse des Rêves, leur devoir est de récolter la magie de l’esprit endormi et de l’utiliser pour guérir, apaiser… ou tuer ceux qui sont jugés corrompus.

Mais lorsqu’une conspiration éclate au sein du temple, Éhiru, le plus célèbre des collecteurs, doit remettre en question tout ce qu’il sait. Choisira-t-il de protéger la femme qu’il a été chargé de tuer, ou regardera-t-il la ville être dévorée par la guerre et la magie ?»

(Illustration de couverture: ?)

[Diversité: pp noir.e, ps noir.e, pp gay]

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D’autres avis dans la blogosphère: Zina des Pipelettes en parlent, Le culte d’Apophis, …

[Lecture n°27 (35/60 points avec les bonus pour l'échelon 4 Fusion dans l’utopique) pour le Challenge de L'Imaginaire édition 12 de Ma lecturothèque]