Rusalka : l'esprit du lac

Michel Stiakakis, guitariste du groupe de métal Skeptical Minds a voulu rendre hommage à ses origines polonaises en écrivant, conjointement avec Alain Poncelet, une bande dessinée sur une légende de son pays. C’est ainsi qu’est née Rusalka : l’esprit du lac, publiée par les éditions NewMoon en janvier 2017. Cette bande dessinée est signée au dessin par Alain Poncelet et Valérie Reniers pour la colorisation.

Au cœur des légendes de la Pologne

Michel Stiakakis et Alain Poncelet nous emmène à la découverte de la légende de Rusalka. Dans la légende originale, elle mêle un peu les contes d’Ondine et de la Petite sirène. Femme esprit du lac, elle s’éprend d’un prince qui finalement la délaissera et la condamnera à un sort funeste. Dans la bande dessinée, le mythe est un peu revisité pour une ambiance d’autant plus sombre tout en conservant une poésie très prégnante. L’histoire d’amour impossible est un thème que j’aime par-dessus tout dans les contes et légendes et j’ai été très touchée par le récit de Rusalka. En peu de mots, tout y est et on se laisse emporter dans les profondeurs de son âme. Mais au-delà de cette unique histoire, les auteurs nous embarquent vers d’autres éléments de la mythologie polonaise lors d’un voyage aux allures oniriques. Mon petit bémol est que tout se déroule trop vite. Si j’ai adoré les éléments des diverses légendes, je regrette qu’elles empiètent sur l’histoire d’amour et inversement. Et oui, après 48 planches j’avais envie d’en avoir plus, plus d’histoire de Rusalka et plus de folklore polonais en général. L’évasion est à prolonger avec un CD du groupe de l’auteur, Skeptical Minds.

« C’est ça la malédiction. C’est ça sa malédiction. Condamnée à errer dans le domaine de la mort. De la souffrance. De la tristesse.»

Un visuel magnifique

Ce qui frappe d’abord avec Rusalka c’est son esthétisme ! J’étais envoûtée par ces dégradés bleutés, doux et froids à la fois, qui sont nuancés par fines touches par un rouge violent et agressif qui transcende la page et nous saute à la figure. Cette colorisation en deux tons (qui, je pense, mêle aquarelle et numérique) est terriblement hypnotique. Elle traduit les nuances du personnage de l’être légendaire qu’est Rusalka, errant entre solitude glaciale et faim vorace de chair humaine. J’aurai aimé que l’intégralité de l’œuvre se contente de cette dualité. Même si j’aime aussi les planches amenant d’autres couleurs, je trouve qu’elles troublent légèrement l’ensemble. Côté dessin, j’ai trouvé le travail d’Alain Poncelet sublime ! Je suis assez sensible à sa patte graphique et j’apprécie grandement son talent pour traduire les expressions de ses personnages. Les regards de Rusalka vous transportent dans des émotions franches et sincères qui émeuvent et interpellent. Son trait se fait tantôt doux et voluptueux, tantôt acéré et violent, exprimant les changements d’état de l’héroïne légendaire. Un vrai bijou.

« Elle me survivrait… Je l’abandonnerais à une éternité de solitude. »

En bref, Rusalka est une bande dessinée au contenu et au visuel envoûtant qui nous emmène au cœur du folklore polonais. Son dessin est magnifique, ses couleurs sont hypnotiques et l’ensemble du récit crée une belle parenthèse onirique. Il est à noter que cette bande dessinée est à réserver à un public mature.

«Venez découvrir Rusalka l'esprit du lac, la légende polonaise d'un créature légendaire qui séduit les hommes puis les tue en les dévorant.»

(Illustration de couverture: © Alain Poncelet 2016)

* Question du jour : quelle est votre histoire d’amour impossible fétiche? *