Diamants

Parmi les pépites de l’Imaginaire des Indés en 2021, les éditions Mnémos nous proposait le nouveau roman de Vincent Tassy intitulé Diamants. Sous une couverture envoûtante, tirée du tableau L’ange déchu de Cabanel, Diamants fait la promesse d’une fantasy envoûtante à la plume envolée. Il ne m’en fallait pas plus pour me donner envie de le découvrir et voici ce que j’en ai pensé…

« Ses ailes blanches brillaient dans le noir. Et sa longue chevelure dorée. Et autour de lui, diamants. Passa dans le cœur de Savannah, dans les veines, la chair, un désir de ne plus exister ; ça ne servait à rien, devant ça, on ne savait pas pourquoi mais on sentait que ce n’était pas la peine du tout, et ce désir ressemblait à un souvenir très lointain, comme un écho des premiers temps du monde, il avait l’odeur de la terre, des plaines immenses, de l’air qui souffle sur la mer. »

Poétique et envoûtant

Je n’avais qu’une certitude avant ma lecture de Diamants : la plume allait être superbe. Vincent Tassy, que j’avais adoré découvrir dans Comment le dire à la nuit, est un conteur envoûtant. Il manie les mots avec une sensibilité et une mélancolie qui relève du romantisme gothique tout en insufflant un vent de modernité au genre. C’est un barde de l’ombre, un maître des histoires au temps suspendu. Diamants, aussi lumineux que sombre, est encore un bel exemple de son talent. C’est un roman de fantasy étonnant qu’il nous propose, avec un univers grandiose et envoûtant et une profondeur philosophique qui sied parfaitement à sa plume. L’arrivée de l’Or Ailé, ange mythique, en pays de Vaivre, bouleversera le monde, créant tensions, jeux de pouvoir et impatience menaçante. Mais c’est aussi un roman qui parle de magie, de pureté, de dépression et d’amour. Surtout d’amour. Il y a de la mélancolie dans cette histoire, ça berce et ça nous brise en même temps, lumière et ténèbres, aurore et nuit, diamants. Car ici, toujours de l’obscurité peut naître la lumière et la brillance la plus précieuse.

« La végétation s’y épanouissait d’elle-même, on ignorait pourquoi. La légende racontait qu’aux temps lointains où Vaivre était le plus haut lieu des enchantements en Samsara, un mage puissant avait déchainé ici-même tous ses pouvoirs pour sauver l’homme qu’il aimait d’une maladie mortelle. Il en avait perdu la vie, et son amant l’avait aussitôt suivi dans l’Inconnaissance. Mais la magie, disait-on, avait fourvoyé la pierre, et la pierre avait vu leur amour ; et depuis les fleurs fleurissaient, profuses, emmêlées, hasardeuses, mais toujours pâles, et transparentes, comme le sont les choses les plus lointaines. »

Suspendu dans l’air

Lire Diamants c’est s’immerger dans un univers de beauté où le temps paraît parfois s’arrêter au fil des réflexions et des peines des personnages. C’est se laisser porter entre les descriptions grandioses des terres parcourues, entre éclats et ombres elles aussi et c’est réfléchir aux jeux de pouvoir à la liberté d’exister. En conséquence, le rythme est assez lent sur une large majorité du roman, pouvant entraîner une certaine lassitude si l’on recherche de la fantasy haletante. J’avoue avoir eu un peu de mal avec la fin personnellement, trouvant les explications mythologiques un peu difficiles à saisir et m’engluant un peu dans le rythme plus lent après des scènes épiques et émotionnellement usantes. Mais il se dégage indéniablement un quelque chose de sublime de ce texte qu’il convient de souligner. Difficile de trouver les mots pour décrire l’étrange sentiment qui nous englobe à la lecture, oscillant entre fascination du beau et désespoir grandiose. C’est un texte aux émotions fortes avec des personnages remarquables, coincés dans les prisons de leur existence. Au cœur de tout, un battement d’ailes suspend le temps et une fleur tente de percer les ténèbres… Diamants !

« Tu ignorais complètement ce qu’était le bonheur. Maintenant tu sais. Et tu te battras, jusqu’à la mort, et au-delà, pour que jamais rien ne te l’enlève. »

En bref, Diamants est un roman qui porte magnifiquement son nom. À la fois joyau aux reflets brillants de la plume de Vincent Tassy, à la fois le carbone sombre comme la mélancolie et la nuit qui s’abat sur son monde, c’est un roman entre ombres et lumières. L’univers est fascinant, l’écriture superbe, les personnages troublants, je ne regrette que le rythme un peu lent qui a fini par me perdre sur le final…

« D’un hiver sans fin naît l’espoir d’un printemps radieux

L’Or Ailé, de la cité immortelle, est descendu des cieux.

Seigneur ou roturier, lequel deviendra son suivant ?

Serviteur, conseiller, dévoué ou confident

Dans le labyrinthe d’Œtrange, il devra le guider

Du royaume de Ronces, aux Brumes emplies de danger.

De l’hiver au printemps, de l’obscurité à la lumière

Percerez-vous les secrets de L’Or Ailé venu sur Terre ? »

(Illustration de couverture : © L’ange déchu – Cabanel 1847)

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[Diversité : pp gay, pp noir.e, ps muet.te, ps gay, ps bisexuel.le]

Addiction, Alcool, Dépression, Deuil, Meurtre, Mort, Suicide

[Lecture n°62/72 (pour l'échelon 5 Fusion dans l’utopique) pour le Challenge de L'Imaginaire édition 9 de Ma lecturothèque]