Terrible : l’enfant, la jeune fille et la sorcière

Terrible est une bande dessinée one-shot écrite et illustrée par Gaël Henry et publiée tout récemment aux éditions Dupuis. Son histoire mêlant le registre du conte, du récit initiatique et la mythologie russe avait retenu mon attention en plus de son esthétique graphique. Et voici ce que j’en ai pensé…

« - On est juste tombées sur l’idiot du village.

- Hum, pas vraiment… Ou alors on peut dire que l’idiotie est la norme. »

Attention, petite mise en garde si vous pensez que lire Terrible sera de tout repos. Si le dessin rond et sa colorisation tendre vous évoque l’écrin doux des contes, voire d’une BD jeunesse, attendez-vous à une sacré surprise. On est en effet loin d’un récit apaisé avec cette bande-dessinée qui cache bien son jeu. Car Terrible porte merveilleusement bien son nom en proposant une histoire où le trash et l’atrocité sont monnaie courante, tout autant que l’humour. Florilège de content warning, de la cruauté animale aux morts atroces, Terrible n’hésite pas sur l’hémoglobine avec un humour noir exquis et propose des personnages psychopathes à foison. L’héroïne elle-même est loin de l’image qu’on pourrait en avoir et l’exploration des métamorphoses de l’adolescence n’a jamais été aussi épique. L’intrigue démarre pourtant comme un conte initiatique, mais c’est l’univers profondément dérangé dans lequel les personnages évoluent qui fait tout basculer. 

Revisitant des contes et figures de la mythologie russe, la BD a l’originalité de proposer d’autres ancrages culturels que ceux auxquels nous sommes habitués. Les réécritures sont cependant elles aussi féroces dans cette bande dessinée qui ne suit que très peu les trames des textes originels pour proposer une interprétation des mythes aussi dérangée que dérangeante. J’ai cependant trouvé cette lecture très plaisante, une fois passée la surprise de l’horreur de certaines scènes. Parce que c’est original, et assumé dans le côté malsain et parce que c’est très bien ficelé. C’est aussi très agréable visuellement, ce trait doux envoûtant dont le décalage, dans le trash, crée un effet humoristique certain. Ce n’est cependant pas une BD à mettre entre toutes les mains vu sa cruauté ambiante.

En bref, Terrible est une BD surprenante où il ne faut nullement se fier aux apparences, que ce soit celle du dessin doux de l’auteur ou de la fragilité de l’héroïne. Car l’histoire n’a rien d’un conte tendre. Cruauté et scènes trash y sont légion pour une lecture surprenante qui revisite la construction d’une personnalité terrifiante par le contexte dans lequel elle s’inscrit.

« Lors d'une sortie estivale en forêt, Ana et son frère Noé se perdent dans une grotte et y découvrent un monde étrange et fantastique. Très vite, Noé disparaît et Ana se lance à sa recherche. Yaga la sorcière, Vassilissa la naïve, Loup gris et Poupée, ces figures emblématiques du folklore russe, vont l'accompagner dans sa quête. Ana apprendra à ses dépens où peut conduire la cruauté...»

(Illustration de couverture et extrait: © Gaël Henry)

> Content warning <

- Livre reçu en service presse. Publication non rémunérée. Merci aux éditeurs. - 

[Lecture n°24 (31/60 points avec les bonus pour l'échelon 4 Fusion dans l’utopique) pour le Challenge de L'Imaginaire édition 12 de Ma lecturothèque]