Peau d'homme

Alors que son auteur, Hubert, est malheureusement décédé en début d’année, sa dernière bande-dessinée Peau d’homme est parue en juin chez Glénat dans la collection 1000 feuilles. Illustrée par Zanzim, Peau d’homme est un one-shot se déroulant dans l’Italie de la Renaissance qui s’inspire du conte Peau d’âne en donnant à une jeune fille une peau de jeune homme à revêtir. J’étais évidemment très intriguée par ce titre dont on entend déjà beaucoup de bien, et voici donc ce que j’en ai pensé…

« -Les bravades, c’est bien joli, mais parfois il faut savoir faire profil bas.

-Et laisser les hypocrites et les bigots gagner parce que tout le monde baisse la tête?»

Viva Lorenzo! Viva Bianca!

Peau d’homme est une BD d’une grande justesse qui m’a filé une jolie claque. Lorsque Bianca revêt une peau d’homme, elle peut non seulement réaliser le fossé qu’il y a entre l’attitude qu’on exige des femmes et celle qu’on exige des hommes, mais peut aussi s’autoriser à aller et à faire ce que seuls les hommes sont censés pouvoir faire. En se revêtant de la peau d’un autre, elle se révèle finalement pleinement à elle-même. Elle devient alors, grâce à un caractère bien trempé, engagé et formidablement moderne, une femme qui s’oppose à la condition du « sexe faible » jugé source de vices. Héroïne juste et inspirante, Bianca/Lorenzo est la courageuse combattante d’une société puritaine fanatique qui voudrait anéantir la liberté d’aimer et contraindre les femmes à rester des êtres purs uniquement destinés à procréer mais jamais à ressentir le moindre plaisir ni désir. Mais Hubert va bien au-delà de ce trait de génie en proposant, en plus, une réflexion sur les contraintes des hommes qui aiment d’autres hommes. Engagée, Peau d’homme est donc non seulement une bande-dessinée féministe, interrogeant les différences de droits et de considération entre les hommes et les femmes, mais c’est aussi une histoire qui promulguent une liberté des moeurs et une liberté d’aimer au sens large. Ce conte revisité est une pépite de tolérance, un cri d’amour à la vie libre et au désir et une formidable histoire de la découverte de la sexualité et du corps.

Sensualité et passion

Peau d’homme est une BD évidemment teintée d’érotisme au vu des thèmes abordés et c’est un dessin plein de sensualité que nous offre Zanzim pour accompagner l’histoire absolument grandiose d’Hubert. Subtiles, envoûtantes, chaque illustration révélant le désir de Bianca est une merveille. L’esthétique visuelle de cette BD est formidable. Zanzim nous propose une Renaissance colorée et pleine de vie qui correspond parfaitement aux messages d’Hubert. Les deux auteurs semblent avoir trouvé un accord parfait qui fait de Peau d’homme un véritable chef d’oeuvre. La dénonciation de l’obscurantisme religieux est d’ailleurs d’une puissance phénoménale dans le dessin du premier prêche auquel nous assistons. Mais ça je vous laisse le découvrir. Car vraiment, si vous ne devez lire qu’une BD cette année, lisez celle-ci.

En bref, Peau d’homme est une merveille. Engagée, la BD promulgue la liberté de désir et d’aimer et interroge la question de genre avec brio. Superbement illustrée, sensuelle, inspirante, cette lecture m’a provoqué un grand coup de coeur.

« Sans contrefaçon, je suis un garçon !

Dans l’Italie de la Renaissance, Bianca, demoiselle de bonne famille, est en âge de se marier. Ses parents lui trouvent un fiancé à leur goût : Giovanni, un riche marchand, jeune et plaisant. Le mariage semble devoir se dérouler sous les meilleurs auspices même si Bianca ne peut cacher sa déception de devoir épouser un homme dont elle ignore tout. Mais c’était sans connaître le secret détenu et légué par les femmes de sa famille depuis des générations : une « peau d’homme » ! En la revêtant, Bianca devient Lorenzo et bénéficie de tous les attributs d’un jeune homme à la beauté stupéfiante. Elle peut désormais visiter incognito le monde des hommes et apprendre à connaître son fiancé dans son milieu naturel. Mais dans sa peau d’homme, Bianca s'affranchit des limites imposées aux femmes et découvre l'amour et la sexualité.»

(Illustration de couverture & extrait: © Zanzim)

[Diversité: pp gay, ps gay, ps travesti.e]

[Lecture n°51/60 (pour l'échelon 4) pour le Challenge de Littérature de l'Imaginaire édition 8 de Ma lecturothèque]