Meurtre aux poissons rouges

Publié en 2010 en italien, Meurtre aux poissons rouges sera traduit en français pour les éditions Fleuve noir l’année suivante. Ce petit polar épistolaire, mêlant lettres et documents d’enquête est signé de deux grands noms de la littérature policière italienne, à savoir Camilleri et Lucarelli. Il existe également en format poche.

Loufoque, original, mais tout compte fait assez anecdotique. C’est en rangeant ce livre à la bibliothèque que la couverture, sommaire, et le titre, énigmatique, ont attiré mon attention. La signature par deux auteurs de polars italiens bien connus a achevé d’attiser ma curiosité. J’avais une envie irrésistible de savoir de quoi était fait ce court roman d’à peine 150 pages dont le format particulier m’attirait. En effet, en parcourant ses pages, on remarque tout de suite la construction épistolaire, l’utilisation de différentes polices selon les écrits tapés ou écrits manuellement mais aussi des documents: rapports d’autopsie, photographies, flyers… et cela rend l’ouvrage particulièrement sympathique en tant qu’objet livre. 

« J’ajoute cette note à la fin, comme on fait dans les polars, pour piquer ta curiosité (et note que je déteste les polars.) »

Côté contenu par contre, cela tombe un peu à plat avec une histoire d’enquête relativement décousue, assez loufoque, plus farfelue et drôle que policière d’ailleurs et tentant d’inclure des énigmes mais de façon trop anecdotique. Cet aspect d’histoire un peu bancal s’explique par l’écriture même du livre. En effet, à la suite d’une question posée aux deux auteurs en interview sur ce que ferait leurs enquêteurs fétiches s’ils se rencontraient, le livre a commencé à naître. Et celui-ci s’est créé à la manière d’un jeu d’échec, chacun envoyant un morceau de texte à l’autre qui devait réagir en fonction, contredisant certainement l’idée qu’il avait de déroulement de l’histoire en cours. Le procédé est intriguant et on ressent dans ce texte un réel plaisir d’écriture, comme si une joute amicale se déroulait entre deux auteurs qui ne manquent pas d’humour. 

« Entre les cannoli et les tortellini au bouillon, ça commence à ressembler davantage à un livre de cuisine qu’à une enquête. »

Justement, c’est l’humour le grand point fort de cet histoire. Les petites pics ne manquent pas, les idées loufoques non plus. Rien que le titre est juste magique. Il n’est pas, selon moi, à considérer comme un roman policier sérieux mais comme un défi amusant entre deux créateurs sur un domaine qu’ils maîtrisent mais avec lequel ils ont décidé de jouer. Certes, j’aurai adoré un texte plus sérieux, avec un réel échange crypté, une énigme complexe à éplucher via les documents (un peu comme le fait Illuminae dans un tout autre registre dernièrement). Mais je me suis quand même bien amusé à parcourir ce petit texte et je l’ai apprécié pour ce qu’il est.

En bref, Meurtre aux poissons rouges est un petit récit fort sympathique qui restera anecdotique mais que j’ai aimé découvrir, ne serait-ce que pour sa construction et pour son originalité. Et puis, quel bonheur de ressentir que des auteurs s’amusent à écrire leur livre!

« Le corps d’un homme gît dans sa cuisine, un sac plastique sur la tête, deux petits poissons rouges à ses côtés. La scène se passe à Bologne. Aussitôt, l’enquêtrice Grazia Negro est dépêchée sur les lieux. En découvrant que la victime est originaire de Vigatà, elle contacte, dans le plus grand secret, son confrère sicilien Salvo Montalbano. Ce dernier accepte de l’aider, mais tous deux doivent se montrer discrets. Rien ne doit filtrer.

Par un savant jeu de ping-pong, les deux enquêteurs se tiennent informés de leurs avancées respectives par courrier, y joignant pièces à conviction, rapports de police, articles de presse, photos, le tout reproduit dans l’ouvrage. Progressivement, les pièces du puzzle se mettent en place…»