Le jour où mon pénis est tombé

Quand un auteur vous contacte et vous propose un titre aussi énigmatique et barré que Le jour où mon pénis est tombé, il est difficile de refuser la découverte. Surtout quand cet auteur est doté d’un sens de l’humour qui transpire du mail et vous donne envie d’en lire plus. Je remercie donc David Duranteau pour la confiance et pour l’envoi de ce roman. Le jour où mon pénis est tombé a été auto-édité via Librinova au format numérique cette année.

Une histoire ubuesque

Vous le constaterez très vite si vous lisez l’extrait téléchargeable en fin de chronique, le ton de l’auteur est très particulier. Loufoque, cynique, moqueur, grinçant, satirique, David Duranteau joue sur une palette d’humours qui ne plairont pas à tous, certes, mais il a le mérite de ne pas faire dans la demi-mesure et de l’assumer pleinement. Les situations surréalistes s’enchaînent au milieu de personnages tous plus ubuesques les uns que les autres. Entre le très pédant et égocentrique Fabrice Carmen, la voisine nympho gothique, le flic Mansard complètement décalé et névrosé (celui-ci m’aura fait bien rire) ou encore le chauffeur soumis à sa femme psychorigide, il y en a pour tous les goûts. Tous ces personnages et toutes les situations ont une tendance à virer à l’absurde, un peu comme dans un roman de Roman Puértolas, mais avec le message important en filigrane en moins. Il m’a en effet manqué un soupçon de sérieux derrière toute cette fanfaronnade… Si j’aime le loufoque, j’aime aussi quand celui-ci sert à masquer quelque chose de plus profond, à faire passer des messages sous le couvert de l’humour. Ici c’est juste burlesque (mais quand on sait que l’auteur a surtout écrit du théâtre, on peut le comprendre). Je regrette également que le ton ne varie pas selon le personnage narrateur, alors même que leurs personnalités soient si différentes. Et si j’aime beaucoup ce cynisme ambiant et le ton décalé, je dois admettre moi-même que certains sujets m’ont moins plu que d’autres et m’ont parfois plus fait grincer les dents que rire… Desproges avait raison, « on peut rire de tout, mais pas avec n’importe qui ».  Personnellement je me serai bien passé des quelques traits misogynes et de la vulgarité qui, selon moi, n’était pas nécessaire. Mais je dois admettre que mis à part ces éléments-là, je me suis parfois bien fendue la poire à la lecture.

« Pour résumer l’avenir qui nous attend, nous les hommes sans pénis, c’est soit l’accident cardiovasculaire après plusieurs années d’extrême nervosité, d’insomnies et de maux de tête intenables, soit me faire dévorer par les femmes que je vais être obligé d’ignorer… Cool ! »

De bonnes bases

Outre l’humour omniprésent, le roman nous conte aussi une petite histoire policière et nous prouve que l’auteur sait manier un certain suspens ou, tout du moins, un certain effet de tension. Je me suis surprise à m’accrocher à la liseuse pour avoir le dénouement d’une situation, prouvant une réelle maîtrise de la montée d’adrénaline, et ce, malgré le côté loufoque. Je regrette cependant que les situations se résolvent beaucoup à coups d’ellipses qui parfois ne permettent pas de répondre à toutes nos questions, mais j’ai apprécié ce petit changement de rythme qu’elles imposaient à la lecture. Il y a vraiment de bonnes idées dans ce roman, que ce soit sur l’aspect surréaliste (qu’il faut juste creuser un peu) ou l’aspect suspens. L’auteur à une plume agréable qui rend la lecture fluide et aucune coquille ne m'a fait rebondir à la lecture (mis à part un personnage décédé qui revient à la vie le temps d’une erreur de prénom quelques chapitres plus loin ^^). Ces 220 pages se lisent extrêmement vite et on passe, au final, un bon moment.

« - Bouffe-moi les seins, inspecteur…

Alors moi, le matin, je peux rien avaler. »

En bref, Le jour où mon pénis est tombé est un roman ubuesque un poil trop loufoque, aux accents de suspens plutôt prometteurs et à la plume cynique assumée. Si l’humour un peu loufoque et grinçant est votre tasse de thé, je ne peux que vous conseiller de tenter cette découverte étonnante.

« Je m’appelle Fabrice Carmen, j’ai 43 ans, je suis le présentateur vedette de la matinale d’une grande radio française.

J’ai du fric, je suis connu, les meufs m’adorent, je suis le mec que tout le monde rêve d’être…

Sauf que récemment les petits désagréments s’accumulent… Mon pénis, par exemple… Il est tombé, un matin, sous la douche… Ça fait un choc de le voir à côté de la savonnette… Et cette nouvelle animatrice à la radio qui ne porte jamais de culotte, c’est la fille d’un cinéaste connu, je crois qu’elle essaie de me piquer ma place… Et comme une apothéose, à l’instant où je vous parle, une femme est allongée sur mon canapé hors de prix, une coupe de champagne plantée dans la gorge… Je m’allumerais bien une clope, moi… »

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