La fille du feu

Dernier roman en date d’Aurélie Wellenstein, La fille du feu a été publié en mai aux éditions Fleuve, collection Outrefleuve. Renouant avec ses thèmes de prédilection, l’autrice nous tisse ici un récit teinté de fantastique qui parle d’écologie et de notre rapport à la nature. Et voici ce que j’en ai pensé…

Un récit à multiples voix

Dans ce roman, Aurélie Wellenstein nous dresse un roman choral à 3 voix (mais qui en contient finalement bien plus…) avec trois protagonistes d’origine et d’histoires bien différentes dont les destins vont s’entrecroiser dans le Canada sauvage. Les fils se rejoignent bien rapidement et constituent une aventure sous tension, une traque sans merci par des personnages tous hantés à leur manière. Trois protagonistes donc, dont la psychologie a été bien travaillée par l’autrice qui sait nuancer et mêler, notamment dans celui de la jeune Mia, l’humanité et l’animal dans une intrication particulièrement réussie. Il y a dans ce personnage un peu de ce qui se lit dans Femmes qui courent avec les loups, dans le sens où c’est un personnage qui accepte pleinement sa part animale, sa part sauvage et qui renoue ainsi avec une nature instinctive et pleine de sagesse ancestrale. Une sagesse qui dépasse largement son enveloppe d’enfant. Elle porte à elle seule une aura hypnotique, envoûtante, à travers le récit. J’ai beaucoup aimé également la personnalité de Nathanaël, une âme pure, bienveillante, sincère qui ne demande qu’à guérir de ses traumatismes. C’est un personnage remarquable par sa simplicité. Et puis Cadzow… qui cache bien des choses. Trois voix qui s’entrelacent et portent aussi à nos oreilles celles d’une nature dévastée, d’animaux qui disparaissent dans la fumée des incendies qui, de plus en plus, ravagent notre planète.

« À l’horizon, les animaux avaient disparu.

Ils étaient en elle, perchés sur les branches mortes de la forêt brûlée qui s’étirait dans ses membres.»

La voix des animaux

Si vous avez déjà lu Mers mortes de la même autrice, vous trouverez ici quelques échos. Aurélie Wellenstein nous parle ici beaucoup des animaux du monde, de l’Australie aux forêts françaises jusqu’aux toundras, qui subissent l’effondrement climatique et sont victimes des feux qui ravagent leurs milieux de vie. Elle nous met, parfois, dans la peau de ces êtres qui n’ont rien pour lutter contre le feu dévorant dans des passages déchirants. C’est un véritable cri d’alerte qu’elle lance en leur donnant émotions et voix, mais c’est aussi un cri de colère et de peur. Cette colère et cette peur comme chacune métaphore du feu, cette rage qui détruit tout, qui emporte, cette peur qui tétanise et ne laisse que cendres. Le feu est partout, surtout dans le cœur des hommes qui ne savent plus protéger ce qui leur permet de vivre. La fille de feu est une écofiction qui soulève toutes ces questions avec force, mais garde aussi en creux un espoir, porté justement par ses personnages. J’ai cependant aussi quelques regrets à soulever, car derrière le message, il y a quelques fils narratifs qui m’ont semblé un peu moins bien ficelés que dans d’autres récits de l’autrice, quelques réactions que j’ai trouvé étranges. J’ai aussi un sentiment d’inachevé, comme si l’histoire manquait peut-être d’un cran d’intensité ou d’un élément qui me permettait de comprendre un revirement important et qui, sur le coup, m’a semblé un peu trop « facile ». Mais j’ai néanmoins apprécié ce récit, ses messages aussi et ce retour à notre rapport à la nature que j’aime tant chez Aurélie Wellenstein.

« Elle n’était pas une catastrophe naturelle. Elle était une déesse. La vengeance de la nature sur les hommes.»

En bref, La fille de feu est un bon roman de l’autrice qui se rapproche un peu de l’excellent Mers mortes. Il se fait la voix d’animaux victimes du réchauffement climatique et des incendies. Il est aussi la voix de 3 personnages qui ont tous un lien avec le feu mais surtout avec la nature. Sous tension, intense et touchant, c’est un récit qui nous emporte, malgré quelques failles, et dont on ressort ému.

« Mia a tout perdu, sa famille, ses amis, son foyer. La petite fille erre dans les plaines du Grand Nord, bien loin du bush australien dont elle est originaire. En elle, un feu brûle, puissant et indomptable.
Quelques kilomètres plus loin, sous les tatouages d'animaux qui recouvrent son corps, Nathanaël cache les cicatrices et le traumatisme liés à l'incendie qui l'a happé, enfant. Le musicien est venu dans le village inuit d'Ilussuaq découvrir les traditions orales qui menacent de disparaître.
Son guide, Cadzow, apprécie cet homme qui veut préserver le chant des siens. Mais sous ses dehors impassibles, il est lui aussi marqué par le feu.
Lorsque Cadzow abat un ours affamé rôdant dans le village, les destinées de ces trois êtres écorchés entrent en collision. La traque sera sans merci, le feu consumera tout sur son passage.»

(Illustration de couverture : © Aurélien Police)

- Livre reçu en service de presse. Publication non rémunérée. Merci aux éditeurs. - 

[Diversité: pp végétarien.ne]

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[Lecture n°25 (35/60 points avec les bonus pour l'échelon 4 Fusion dans l’utopique) pour le Challenge de L'Imaginaire édition 13 de Ma lecturothèque + thème trimestriel Été (juillet-sept.) - mer, eau, montagne, découverte, environnement]