Dans les eaux du Grand Nord

Suivant les conseils d’Uranie qui en parlait tellement bien sur son blog, j’ai eu envie de découvrir le roman Dans les eaux du Grand Nord de Ian McGuire paru en 2017 aux éditions 10/18. Premier roman traduit en français de l’auteur anglais, Dans les eaux du Grand Nord est un roman noir historique qui nous embarque à bord d’un baleinier au XIXème siècle. Et voici ce que j’en ai pensé…

« Les mots sont tout ce que nous avons. Si nous y renonçons, nous ne sommes plus que des bêtes.»

Un avis lacunaire

Je dois vous avouer que si je vais m’efforcer de rester la plus objective possible dans cet avis, ma lecture a tant été orientée par mon ressenti subjectif que certains éléments ne concerneront que mon opinion très personnelle. En effet, bien que j’y étais préparée, j’ai du sauter quelques passages à la lecture à cause d’un excès de violence à l’égard des animaux. Il était évident qu’embarquer à bord d’un baleinier allait être difficile pour moi et je constate ici que mon seuil de tolérance à la violence est bien plus faible concernant les animaux (en particulier les animaux marins) que concernant les humains. Cela a évidement un peu bloqué mon enthousiasme de lectrice bien que cette violence se justifie entièrement par le contexte historique et social. Justifié, certes, mais non moins insupportable pour moi. J’ai finalement pris le parti de faire une « lecture à trous » pour ne pas me forcer à ressentir le malaise provoqué par les scènes de pêche et chasse. J’ai donc peut-être perdu un peu de l’âme du roman et mon avis est sans doute lacunaire lui aussi. Outre cet aspect, j’ai éprouvé quelques difficultés à entrer pleinement dans l’histoire à cause de quelques longueurs et d’un léger manque de tension qui m’a fait décrocher de la lecture à plusieurs reprises. Mais il y a aussi du positif dans ce roman et même si j’ai une opinion finale très mitigée, il est important de vous le souligner.

« -Vous faîtes comme ça vous plaît, et je fais pareil. Vous acceptez ce qui vous convient et vous refusez ce qui vous convient pas. La loi, c’est rien qu’un nom qu’on donne à ce que certains hommes préfèrent. 

Sumner sent une douleur croître derrière ses yeux, un écoeurement s’aigrir dans son estomac. Parler à Drax revient à crier dans les ténèbres avec l’espoir que les ténèbres vous répondront.»

Glacial, rude, âpre

Dans les eaux du Grand Nord est un roman noir dont le gros point fort est son réalisme. L’ambiance est âpre, crasse, malsaine. La lecture respire la misère, la violence et le sang autant que le froid glacial des eaux du Groenland. Les personnages eux aussi, ont un côté très crédible avec leur parler aussi rude que les conditions qu’ils affrontent. Et bien que l’histoire reste assez « classique », le traitement qui en est fait est assez juste. On comprend parfaitement la spirale violente de mauvais choix de ces êtres attirés par la richesse comme les mouches autour d’un étron. L’intrigue pue, suinte d’immoralité et nous apparaît crédible. Evidemment, cela se couple à quelques passages qui ne conviendront pas à toutes les sensibilités (par exemple les passages avec les animaux pour moi, mais pas que). Il n’empêche que l’auteur ne fait pas dans la demi-mesure. Ça plait ou ça ne plait pas mais c’est assumé. Attention cependant, le contexte historique n’est pas tendre avec bon nombre de catégories de la population. Le roman est donc rempli de sexisme, de racisme et d’homophobie qui collent à l’époque mais qui auraient mérité, pour moi, d’un peu de remise en question. Mais là encore, Ian McGuire assume et préfère le réalisme d’époque au ménagement des sensibilités de chacun. Vous voilà prévenus. 

En bref, Dans les eaux du Grand Nord est un roman à l’ambiance âpre et sordide qui nous embarque dans un contexte historique rude et glaciale qui ne ménage pas les sensibilités. Soit ça passe, soit ça casse. Et pour moi, malheureusement, ça a bloqué.

« Puant, ivre, brutal et sanguinaire, Henry Drax est harponneur sur le « Volunteer », un baleinier du Yorkshire en route pour les eaux riches du cercle polaire arctique. Patrick Sumner, un ancien chirurgien de l’armée traînant une mauvaise réputation, n’a pas de meilleure option que d’embarquer sur le baleinier comme médecin. En Inde, pendant le siège de Delhi, Sumner a cru avoir touché le fond de l’âme humaine, et espère trouver du répit sur le « Volunteer »… Mais pris au piège dans le ventre du navire avec Drax , il rencontre le mal à l’état pur et est forcé d'agir. Alors que les véritables objectifs de l'expédition se dévoilent, la confrontation entre les deux hommes se jouera dans l'obscurité et le gel de l'hiver arctique.»

(Illustration de couverture: © Leo Nickolls)