Ce matin-là, mon voyage a commencé

Pour la rubrique album de ce mois de juin, j’avais envie de vous parler voyage. Et c’est ainsi que mon regard c’est tourné vers un album écrit et illustré par Barroux (auteur jeunesse que je trouve essentiel) : Ce matin-là, mon voyage a commencé. Publié en 2020 chez Albin Michel jeunesse, c’est un album destiné aux enfants de plus de 6 ans et voici ce que j’en ai pensé…

Plus qu’un voyage

L’album s’ouvre sur un héros qui n’en peut plus de son quotidien gris et terne, réglé sur des horloges dans une ville sans âme. Il décide de tout quitter et emporte avec lui le strict nécessaire, c’est-à-dire, la moitié de sa maison. Au fur et à mesure de son épopée, il fera des rencontres, tantôt humaines, tantôt animales, et chaque fois, il y laissera un objet finalement superflu jusqu’au dénuement. Humaniste, écologique, l’album nous parle de partage, de dialogues, de respect de la nature aussi et nous rappelle avec subtilité et force ce qui est essentiel. On peut le qualifier de philosophique, invitant au désencombrement de l’espace comme de l’esprit, pour redonner souffle à sa vie. L’auteur nous transmet sa sagesse aux travers de ce voyage qui changera pour toujours le destin du héros et de ceux qu’il côtoie. C’est autant un cri d’amour à la nature qu’un cri d’amour aux liens sociaux puisque les rencontres comme le dénouement créent du lien. C’est un album qui, sous couvert d’une aventure toute simple, non dénuée d’un certain humour et de beaucoup de tendresses, est riche d’enseignements, comme toujours avec Barroux. Un vrai coup de cœur.

Entre détails et paysages esquissés

Le style graphique de Barroux dans cet album ne conviendra peut-être pas à toutes et tous. Si notre jeune héros, ses rencontres et ses objets sont fins et détaillés, l’environnement traversé est essentiellement constitué de traits de pinceaux, souvent noirs sur fond orangé, qui donnent à l’œuvre un aspect peut-être un peu sombre mais soutenant le propos du dénuement. J’y ai personnellement plutôt ressenti de la chaleur, de l’exotisme aussi, symbole du voyage du héros. C’est en tout cas un album qui, graphiquement, interpelle et retient l’attention, conservant un aspect quasi-enfantin efficace.

En bref, Ce matin-là, mon voyage a commencé est un album formidable qui nous enjoint à un retour à l’essentiel et rappelle l’importance des liens sociaux et du respect de la nature. Ce voyage philosophique est superbe et riche d’enseignements. Barroux est décidément un auteur dont je trouve le travail admirable en littérature de jeunesse.

« C’est l’histoire d’un départ, d’un voyage, et d’un retour. Un matin, notre héros remplit un grand sac à dos : un couteau multifonction, une boîte d’allumettes, une trousse à pharmacie… Puis, il part droit devant lui. Sur son chemin, il fait des rencontres : chacune d’entre elles lui donne l’occasion de se délester d’un ou plusieurs objets, plus encombrants que nécessaires. Un jour, il est temps pour lui de rentrer, entièrement allégé. Une fois chez lui, il échange avec ses voisins souvenirs et graines, qu’ils plantent de concert, de sorte que très vite, la ville est embellie par la végétation… »

(Illustration de couverture et extrait : © Stéphane Barroux)