Un léger bruit dans le moteur

Adaptation sous forme de bande dessinée du roman éponyme de Jean-Luc Luciani publié aux éditions L’écaillier du sud, Un léger bruit dans le moteur a remporté le prix polar SNCF de la BD en 2013 avant d’être réédité en 2017 chez les éditions Petit à petit. Au scénario elle est signée par Gaët’s et au dessin par Jonathan Munoz (à qui on doit la BD Godman), et voici ce que j’en ai pensé…

Ultra malsain

Quand ma collègue de travail m’a déposé la BD sur mon bureau en disant « ça devrait vraiment te plaire, c’est ton style » j’ai su que cette BD serait profondément glauque et dérangeante (et j’aime l’image que mes collègues ont de moi ^^). Et elle n’avait pas tort. Un léger bruit dans le moteur est une BD extrêmement dérangeante, tant dans le propos que dans le style, et elle ne peut que plaire aux amateurs d’ambiance malsaine comme moi. L’histoire se déroule dans un environnement propice à la dérive : un lieu isolé du reste du monde, une population pauvre, beaucoup de mauvais penchants et beaucoup de regards qui se détournent de la souffrance de l’autre. Les mœurs du coin sont plutôt dérangeantes, allant de l’abus sexuel à la violence, et les comportements sont eux aussi néfastes, concentrant racisme et malhonnêteté. Et au milieu de tout ça, notre narrateur, petit gamin d’une dizaine d’années, veut tuer tout le monde et a même déjà commencé en fracassant le crâne de son frère sur une pierre. Et il y a pris beaucoup de plaisir ! L’ambiance est garantie pour nous faire frissonner, pour nous rendre très mal à l’aise et nous hanter longtemps. Le dessin ajoute encore à cette impression déroutante, avec des teintes sépias et grises sombres et macabres où seul le rouge jaillit et saute aux yeux du lecteur. Mais surtout, il souligne l’horreur avec des regards criant la folie et la perversité et qui fixent parfois le lecteur pour mieux le tourmenter. Le sentiment malsain nous attrape dès les premières planches et nous colle ensuite à la peau, même une fois l’histoire terminée. C’est ultra glauque, ça ne plaira pas à tout le monde, mais moi j’ai adoré.

L’enfant psychopathe par excellence

L’histoire de ce petit gamin qui cherche à tuer tout son hameau n’est pas juste perturbante, elle est aussi très bien menée, laissant planer un réel suspens sur l’issue assurément macabre de son histoire. La tension est permanente, l’attente du dénouement fébrile et le final plus étonnant qu’attendu. Mais ce m’a surtout marqué c’est le style. Ici, c’est le petit garçon qui est le narrateur. Aussi, tant dans le choix de la police, très enfantine, que dans le style d’écriture et le vocabulaire, on ressent la jeunesse du personnage. Alors forcément, quand on lit, avec des propos d’enfants, la volonté de tuer et le plaisir de faire souffrir, ce n’en est que plus troublant et plus malsain. Etre dans la tête de ce gamin qui a « un léger bruit dans le moteur » est terriblement oppressant mais aussi complètement immersif. On comprend alors presque sa volonté de massacrer son environnement puisqu’on voit à travers ses yeux que ce qui l’entoure est mauvais, mais sans pour autant pouvoir soutenir pleinement ses pensées psychopathes. Cette ambivalence entre l’innocence enfantine et la jouissance face à la souffrance de l’autre est ce qui rend cette BD si particulière et si marquante.

En bref, âmes sensibles s’abstenir, Un léger bruit dans le moteur est une BD terriblement dérangeante, malsaine et glauque. Mais si ça vous attire plus que ça ne vous fait fuir, foncez, vous allez adorer !

"Dans une petite et sinistre communauté villageoise isolée, un gamin se prépare à commettre le pire: décimer tous ceux qui l’entourent. Il enchaîne alors les victimes sans soulever le moindre soupçon. Mais le passage d’un véhicule dans cet endroit perdu pourrait changer les choses…

Du coup de couteau au coup de foudre : l’histoire d’un enfant qui tue les gens."

Bande-annonce de la BD: