65 ans et plus ...

Il y a un an je vous parlais du recueil de nouvelles ultra courtes, et premier livre, de Jessica Lefèvre intitulé Histoires de poche que j’avais bien apprécié. En 2016, toujours chez la maison d’édition Acrodacrolivres, l’auteur récidive avec un nouveau recueil, mais cette fois, centré sur les séniors et intitulé 65 ans et plus… Et c’est préfacé par Frank Andriat ce qui ne gâche rien!

[NB: Un tout grand merci à Jessica Lefèvre de me faire à nouveau confiance en me partageant son second livre!]

Des séniors à l’honneur

Lorsque j’ai reçu ce nouveau recueil de nouvelles, j’ai été agréablement surprise par son thème: le séniors. Souvent exclus de la littérature, ou alors cantonnés à des rôles les isolant à leur condition de « personne âgée », il est bien rare de les voir ainsi mis en avant. Et quel plaisir! Jessica Lefèvre nous parle d’eux avec un regard vivifiant et original. Ils sont tantôt amoureux transis, tantôt meurtriers, tantôt d’une sincérité touchante, tantôt drôle à en mourir. Alors oui, évidemment, les thèmes de la maladie ou de la mort ne sont pas exclus, mais ils ne sont qu’une partie de l’ensemble plein de couleurs que constitue le recueil. Elle redonne vie à ces séniors, les mettant même parfois en condition de jeunes coquins, ou de personnes beaucoup plus à la page qu’il n’y paraît dans la nouvelle Le trône de fer par exemple. Et ce qui est agréable c’est que cette réalité n’est pas fantasmée, elle est sincère. Moi qui croise tout un palmarès de ces héros du quotidien dans mon travail, je peux vous dire que j’en ai reconnu quelques uns, notamment concernant la nouvelle du Club de lecture. Elle ne les déconsidère pas et c’est ça qui est terriblement génial dans ce recueil. Les nouvelles font échos à nos propres grands-parents, à notre vécu, à ceux que nous croisons et donnent aux séniors une dimension importante méritée. Et ce qui est génial c’est que l’auteur les met en lumière dans des situations très diverses, des nouvelles toujours ultra courtes qui se dévorent rapidement, même pour ceux qui n’ont « pas le temps ». Un vrai régal!

« C’est alors que m’est venue une idée folle. Celle d’organiser Halloween dans notre home, histoire d’égayer pour une fois notre morne soirée du 31 octobre. La chasse aux bonbons est néanmoins exclue vu que la majorité des résidents ne peut de toute façon plus mâcher quoi que ce soir de dur avec ces foutus dentiers en résine. » - Extrait de Le home - Halloween

Une multitude de genres

Dans ce recueil de nouvelles, Jessica Lefèvre nous propose des récits très variés, tantôt humoristiques, tantôt dramatiques, passant du genre policier à la jolie romance, le tout, hormis la première nouvelle, en 4 pages maximum pour chaque histoire. Si parfois ce mélange des genres rend la lecture un peu confuse si on enchaîne un peu trop vite les nouvelles, elles sont aussi le signe d’une maîtrise des styles et, toujours, de la chute. L’art de la nouvelle est complexe, surtout dans un format aussi court, mais Jessica Lefèvre semble s’y épanouir de plus en plus et sa plume est en plein essor. Si, comme dans tout recueil, il y a quelques inégalités de niveau entre les récits, il faut avouer que beaucoup m’ont vraiment plu/touché. La nouvelle plus longue du début, Mamie Kit Kat a été une bouffée d’émotions, faisant écho à du vécu et à une nostalgie intense avec son côté très intime. Le Home - La cour de récré est tout en poésie et douceur. Retrouvailles m’a carrément fait pleurer, et ça en 2 pages seulement! Coma m’a au contraire fait beaucoup rire et Dent gâtée m’a touché. Je suis passé par toute une palette de sentiments et d’émotions avec ce petit recueil. La simplicité et la tendresse m’ont ému et m’ont même donné des idées pour mon travail auprès des séniors (que demander de mieux). J’ai aussi eu le grand plaisir d’être beaucoup plus surprise qu’avec son premier recueil qui était plus cynique et dont les chutes étaient plus évidentes pour mon esprit tordu. 

« Il n’y aucune parole de réconfort permettant de surmonter la perte d’un être cher. Le manque est difficile à combler. Seul le temps aide à panser les blessures. Les souvenirs heureux aussi. » - Extrait de Mamie Kit Kat

En bref, Jessica Lefèvre confirme son talent pour les nouvelles et pour son originalité en choisissant cette fois de faire une ode aux séniors, qu’ils soient malades ou en pleine de forme, espiègle et dynamique ou pantouflard. C’était vraiment une belle idée!

« Si vous avez aimé vous laisser séduire et/ou surprendre par les nouvelles très très courtes de Histoires de poche, vous allez adorer renouveler cette expérience littéraire unique avec ce nouveau recueil, 65 ans et plus, mettant en scène des personnes âgées dans des situations plus rocambolesques les unes que les autres ! Tantôt policières, légères, humoristiques ou nostalgiques, ces nouvelles ultra courtes sont le résultat d'interminables heures passées dans les transports en commun de la capitale néerlandaise et constituent le produit fini d'une imagination débordante qui risquerait bien de vous rendre accro! A la plume de l'auteure évidemment! »

(Photographie de couverture : © Stephen Burnett)