Widjigo

Le 29 septembre, les éditions Albin Michel Imaginaire publient le nouveau roman d’Estelle Faye, Widjigo, un roman fantastique se déroulant à Terre-Neuve au XVIIIème siècle. Définitivement conquise par la plume de l’autrice qui sait créer des ambiances très immersives, j’attendais cette échappée dans le genre horrifique avec impatience. Et voici ce que j’en ai pensé…

[NB : Un immense merci à Gilles Dumay pour ce service presse et à Estelle Faye pour la dédicace.]

"Ils sortent de l'océan, reprit Gabriel, avec un frisson. Ils viennent dans les ombres et les brumes, ils descendent des glaces du Nord. Ils ont faim et ils dévorent les hommes, jusqu'à ce qu'il n'en reste aucun."

Un roman qui nous happe

Widjigo est un roman captivant. Dès les premières pages, Estelle Faye instaure un contrat avec son lectorat : la promesse d’une histoire qui nous tiendra jusqu’au bout de la nuit. Et la promesse est tenue ! Avec une plume maîtrisée, elle tisse pour nous un décor glacial qui nous procurera des sueurs froides. Sa maîtrise dans la création d’une ambiance immersive trouve son point d’orgue avec ce roman horrifique qui nous happe complètement. Si vous craignez le genre horrifique, laissez-lui tout de même une chance car c’est un roman très réussi, si ce n’est le meilleur que j’ai pu lire d’Estelle Faye. On y ressent la morsure du froid, les sueurs de la fièvre, l’angoisse des cauchemars et l’oppression grandissante au fil des pages. C’est très réussi ! On n’a pas vraiment envie de reposer le roman une fois la lecture débutée et c’est d’ailleurs à déconseiller pour mieux profiter de cette immersion. Certaines scènes sont aussi particulièrement visuelles, l’écriture arrivant à nous faire voir les pas de danse comme les regards acérés pour mieux nous plonger au cœur des pages et nous y emprisonner.

"Je crois à ce que j'ai vécu, à la neige, aux orages, aux longues nuits... Je crois au chemin d'étoiles et à la cruauté des hommes. Et je crois à la solitude, à la faim et à l'épuisement qui parfois changent les hommes en monstres. Qui nous dévorent et nous poussent à vouloir assouvir à notre tour des instincts insatiables. J'ignore s'il existe un dieu unique, un grand esprit ou un premier conte. Mais je suis certaine que nous portons en nous nos pires ennemis."

Une narration précise

Estelle Faye a écrit un roman d’une justesse folle. Avec une narration habilement construite, pleine de surprises et de rebondissements, elle fait toute la démonstration de son talent de conteuse. L’intrigue se joue de nous et s’adresse à nos peurs profondes en nous faisant douter de tout et de tout le monde. Également roman de survie, Widjigo plonge au cœur de l’âme humaine et des monstres qui sommeillent en chacun de nous quand la raison défaille. L’autrice explore la colère et la culpabilité avec force en nous offrant un roman particulièrement juste sur ce qui est de la psychologie des personnages. Ils ont tous une réelle épaisseur et certains et certaines hanteront ma mémoire pour longtemps (notamment Pénitence). Estelle Faye questionne aussi brillamment la notion de monstruosité, mais sur ce sujet, je ne peux rien vous révéler sous peine de divulguer des éléments. C’est également un roman politique, questionnant la Révolution française, l’injustice de classe, le racisme et la rédemption en toile de fond d’un vrai et bon roman angoissant.

En bref, Widjigo est un roman fantastique dans tous les sens du terme. L’ambiance, angoissante et glaciale est particulièrement réussie, la plongée au cœur de l’âme humaine est aussi terrifiante que juste et la plume est superbe. Immersif, captivant, c’est un roman difficile à lâcher qui nous happe par sa narration précise. Une grande réussite. Il sort demain en librairie !

« En 1793, Jean Verdier, un jeune lieutenant de la République, est envoyé avec son régiment sur les côtes de la Basse-Bretagne pour capturer un noble, Justinien de Salers, qui se cache dans une vieille forteresse en bord de mer. Alors que la troupe tente de rejoindre le donjon en ruines ceint par les eaux, un coup de feu retentit et une voix intime à Jean d’entrer. À l’intérieur, le vieux noble passe un marché avec le jeune offi cier : il acceptera de le suivre quand il lui aura conté son histoire. Celle d’un naufrage sur l’île de Terre-Neuve, quarante ans plus tôt. Celle d’une lutte pour la survie dans une nature hostile et froide, où la solitude et la faim peuvent engendrer des monstres... »

(Illustration de couverture : © Aurélien Police)

D’autres avis sur la blogosphère : Au pays des cave trolls, Les histoires de Lullaby, L’épaule d’Orion, De l’autre côté des livres, Fantasy à la carte…

[Diversité: ps métis.se]

> Content warning <

* Lecture pour le #PAC Pumpkin Autumn Challenge 2021 de Guimause: Menu Automne Frissonnant - catégorie Double, double, toil and trouble *