La marche funèbre des marionnettes

Nouveau titre de la collection Une Heure-Lumière des éditions Le Bélial’ paru en mai 2024, La marche funèbre des marionnettes est une novella d’Adam-Troy Castro qui s’inscrit dans son vaste univers autour d’Andrea Cort (bien que l’héroïne n’y figure pas). Cette histoire qui peut se lire indépendamment, se place en prologue du troisième opus de la trilogie de romans, La guerre des marionnettes (ainsi que de la nouvelle Les lames qui sculptent les marionnettes) chez Albin Michel Imaginaire. Et voici ce que j’en ai pensé…

« Laissez-la. C’est une pèlerine. Si elle souhaite mourir, c’est son droit le plus strict.»

Est-ce qu’avoir lu les livres de la trilogie est nécessaire avant de se lancer ?

Nécessaire, non. Mieux, certainement. Si vous n’avez jamais rien lu dans cet univers, vous risquez en effet d’être probablement perdu face aux espèces extraterrestres qui naviguent autour de nos personnages, de ne pas forcément saisir la richesse et les subtilités de leurs relations, de leurs spécificités sans parler de l’ampleur de ce qui se joue. Car chez Adam-Troy Castro, chacun porte le poids d’un passé, d’une histoire, d’une culture. Tout évolue, les actions entraînent des conséquences et les faits ont un réel impact. C’est ce qui en fait d’ailleurs l’immense richesse. Mais pas de panique, si vous voulez vous lancer dans ce monde par cette porte, vous y trouverez aussi une novella formidable qui vous invitera certainement à creuser un peu plus les œuvres de cet univers. Si vous comptiez vous arrêter à cette lecture, vous passeriez en effet à côté d’une formidable découverte qui, de nouvelle en roman, ne cessera de vous épater par son originalité, sa qualité d’écriture et l’étendue, tant de son monde que de son propos.

« Vous restez le cul assis sur cette foutue tribune, à pousser des « oh » et des « ah » face au spectacle, et vous y allez de votre petite larme pour toutes ces marionnettes qui se hachent mollis, et en même temps, ça vous excite.»

Une novella d’ethno-SF intense

La marche funèbres des marionnettes nous propose un récit sur une autre planète où, divers ambassades extraterrestres et humaine, assistent à un rituel culturel qui leur semble énigmatique, beau et tragique. Ils observent, se fascinent pour cet acte dont ils ne saisissent pourtant rien. Lorsqu’une humaine bouleverse le spectacle en y participant et y risque sa vie, on se trouve plongé dans un récit intense qui explore avec brio l’impossibilité de saisir les subtilités d’une culture qui nous est totalement étrangère mais aussi le mépris à l’égard de cette dernière et de la vie des ces espèces. Loin d’un simple récit SF, Adam-Troy Castro tisse avec brio un ensemble de réflexions puissantes sur l’altérité, sur la tolérance aussi, et explore les failles de l’humanité qui se place au-dessus des autres mais peut néanmoins apprendre, si l’effort est fait. C’est aussi un texte chargé d’une émotion sincère, celle qui entoure la rencontre de deux êtres qui s’attachent l’un et l’autre dans le chaos par un échange d’une beauté folle. C’est aussi un récit sur le destin, sur les limites de nos concepts et conceptions. Aussi fascinant que ne l’est le Ballet des marionnettes pour nos ethnologues-ambassadeurs, c’est un récit qui transporte sans faillir et laisse en creux des messages importants en plus d’étendre encore un univers d’une richesse infinie.

En bref, La marche funèbre des marionnettes est une nouvelle pépite d’Adam-Troy Castro qui propose non seulement un univers de SF d’une richesse folle qu’il développe et fait évoluer de texte en texte mais aussi une réflexion profonde sur l’altérité et l’incompréhension d’une culture qui nous est totalement étrangère. Le tout sans oublié l’émotion, la sincérité d’une rencontre et la beauté fascinante d’une forme d’art au-delà de tout ce qu’on arrive à envisager. Grandiose.

« Futur lointain. Planète Vlhan.
Ils sont tous là. Ambassadeurs et représentants de la plupart des mondes et intelligences connus. Sur leur estrade, serrés les uns contre les autres, le regard tourné vers une seule direction, tendus. Car ceux qu’ils observent, ces êtres impénétrables, colossaux, que d’aucuns nomment les Marionnettes, s’apprêtent à se livrer au plus singulier des rituels : le Ballet, une communion frénétique de plusieurs jours à l’issue de laquelle ils mourront — par dizaines de milliers. Nul ne comprend les motivations de ce sacrifice annuel ultime qui fascine toute la Galaxie. À commencer par Alex Gordon, exolinguiste au service de la Confédération terrienne, qui va y assister pour la troisième fois. Mais alors que les Marionnettes, par myriades, agitent leurs fouets immenses, Alex distingue une silhouette inattendue et résolument non extraterrestre au sein de la mêlée : une jeune femme appareillée de façon étrange qui semble sur le point de se joindre à la danse alien. Cette femme n’a rien à faire là, et elle se prépare à mourir. À moins que… »

(Illustration de couverture: © Aurélien Police)

- Livre reçu en service presse. Publication non rémunérée. Merci aux éditeurs. - 

> Content warning <

D’autres avis dans la blogosphère: L’Épaule d’Orion, Syndrome Quickson, Les lectures du maki, Le nocher des livres …

[Lecture n°26 (33/60 points avec les bonus pour l'échelon 4 Fusion dans l’utopique) pour le Challenge de L'Imaginaire édition 12 de Ma lecturothèque]