Cimqa

Après un premier roman coup de coeur, After®, récompensé du prix Utopiales et ayant bénéficié d’une belle réception critique, Auriane Velten est revenu en octobre avec un nouveau titre publié chez Mnémos. Intitulé Cimqa, ce second roman nous plonge dans un monde où une cinquième dimension, celle de l’imagination, bouscule les existences de ses personnages. Et voici ce que j’en ai pensé…

« Elle avait envie de hurler: survivre ne me suffit pas! Parce qu’elle ne supportait plus ce corset de la peur. Elle se sentait limitée, obligée, détournée. Elle ne voulait plus avoir à penser à l’argent, et à sa retraite, et aux prédictions, et aux chiffres de vente. Elle ne supportait plus de devoir. Elle avait besoin de pouvoir. Et de créer.»

Pour la liberté de créer

Le récit de Cimqa s’articule autour de deux lignes de narrations qui s’alternent. Nous suivons ainsi l’histoire de la jeune Sarah, dont la vie est bousculée par l’apparition de la cinquième dimension et développe peu à peu ses talents de maîtrise pour incarner ce qu’elle imagine dans la réalité. Et en parallèle, la vie de Sara, femme dans la quarantaine en proie aux angoisses et aux doutes qui travaille chaque jour avec son imagination pour créer dans l’industrie du divertissement. Avec cette proposition très originale d’univers, Auriane Velten explore à nouveau une thématique qui lui semble chère: la création et la beauté de ce qui est créé. Sarah et Sara aspirent toutes les deux à  imaginer librement, dans le but de faire rêver, d’offrir de la beauté au monde. Bien évidemment, le monde humain est toujours décevant et cherche à dévoyer la création dans un usage de domination ou de rendement capitaliste. Auriane Velten lance un magnifique cri d’amour pour la liberté de créer, de faire du beau sans qu’il y ait besoin d’une utilité autre que le pouvoir de faire rêver l’autre et de ré-enchanter le monde. Ce n’est pas sans évoquer le propos d’Emily St. John Mandel dans Station Eleven qui rappelle l’importance de la création, en particulier dans un monde où chaque action se devrait logiquement d’être utile. Et ce genre de propos me touche toujours beaucoup. Verser du beau dans le monde est beaucoup plus important qu’il n’y paraît et ce roman le rappelle joliment. Il y a évidemment un parallèle certain avec le travail d’auteur/autrice, qu’on bloque de plus en plus par des schémas vendeurs, des difficultés d’argent et de l’insécurité qui contraignent toujours plus leur possibilité de créer. 

« Moi aussi, je veux me reposer quand je rentre chez nous, le soir. Parfois, j’ai juste envie de lancer un jeu et de mitrailler des aliens. Et parfois, j’ai besoin d’autre chose. Pour me reposer autrement. Me reposer du monde entier. Tu vois ce que je veux dire? J’ai envie de quelque chose de beau. D’inconnu. De puissant.»

Mais quelques failles

Je vais nuancer malheureusement un peu mon enthousiasme. Si j’ai adoré l’idée de ce roman et les messages qu’il propose, j’ai aussi eu quelques difficultés à accrocher pleinement au récit alors que j’avais eu un coup de foudre pour After® (ce qui a aussi créé de hautes attentes). J’ai d’abord été dérangée par le style des passages avec la jeune Sarah. Dans une volonté de coller au jeune âge du personnage, l’autrice a, semble-t-il, adapté son écriture ce qui m’a vraiment déstabilisée puisque je ne retrouvais pas l’élégance de son premier roman. J’ai également eu quelques difficultés à m’attacher aux deux héroïnes que j’ai trouvé un peu trop lisses. L’histoire conserve heureusement quelques surprises derrière une intrigue, et l’idée même d’une dimension de l’imagination reste une idée suffisamment accrocheuse pour rendre la lecture agréable. La plupart des avis sur ce roman sont très enthousiastes et je ne voudrais pas vous empêcher de le découvrir par une opinion plus mitigée. Je vous invite en tout cas très vivement à découvrir l’autrice, notamment avec After® qui reste une pépite.

En bref, Cimqa est une formidable ode à la création et à la beauté de l’imagination. Avec son univers très original et son propos engagé, c’est un roman qui dénonce les manques de liberté dans les domaines artistiques. J’ai malheureusement eu quelques peines à m’accrocher aux personnages et l’intrigue, comme l’écriture, souffre un peu de la comparaison avec le premier roman d’Auriane Velten pour moi. Cela reste une lecture agréable mais pour laquelle j’avais trop d’attentes. 

« Imaginez que le monde ait un jour le hoquet ; des créatures et des objets commencent à apparaître. Imaginez trouver un moyen de faire venir ces choses selon votre désir… jusqu’à susciter l’intérêt d’une équipe de scientifiques.

Imaginez travailler pour la plus grande industrie du divertissement, mélangeant cinéma et imagination. Imaginez recevoir l’opportunité de votre vie, mais continuer à être rongé par l’anxiété. Jusqu’à rêver qu’une petite fille vous offre son aide.

C’est dans ce(s) monde(s) chamboulé(s) par l’apparition de la cinquième dimension, celle de l’imagination, que les destins de Sara et Sarah s’écrivent. Mais comment empêcher que la magie ne devienne qu’une nouvelle source de pouvoir et de profit ?»

(Illustration de couverture: © Scott Uminga)

- Livre reçu en service presse. Publication non rémunérée. Merci aux éditeurs. - 

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