A moi seule

Sorti en salles le 4 avril 2012, A moi seule traite de séquestration et de la relation si complexe qui se construit entre la personne enfermée et son ravisseur. Il est signé Frédéric Videau (Variété Française, Le Fils de Jean-Claude Videau).

Perturbant, touchant et profond. Voilà les trois termes qui caractérisent ma pensée à la sortie de la séance. Le film commence par un avertissement: toute l'histoire n'est que fiction. Le réalisateur souhaite nous avertir: certes il a écrit ce film en s'inspirant de Natascha Kampusch, fortement imprégné de la première interview qu'il y a eu d'elle et de cette image de femme forte malgré les huit années de séquestration; cependant, ce n'est pas son histoire qu'il raconte mais il s'en sert pour aborder des thèmes complexes comme les relations entre la victime et son ravisseur et la difficulté d'être libre dans l'après. Le film débute par la libération de la jeune Gaëlle, comme un nouveau message au spectateur: on ne traite pas de la séquestration mais de la liberté. Et c'est par flash-backs, toujours parfaitement liés au présent que l'on nous raconte le lien entre Vincent, ouvrier non-violent mais dont le tempérament change d'une seconde à l'autre, et sa "prisonnière" qui semble l'excuser et à la fois le fuir. Les parties au présent nous montre une jeune fille confrontée à un monde qu'elle ne comprend plus, à des parents plus touchés par son absence qu'elle (un père devenu alcoolique, une mère au bord de l'implosion émotionnelle) et surtout, à une liberté qu'elle peine à se donner intérieurement. Car au fond, au-delà que la liberté physique, c'est la liberté psychique qui semble être le sujet plus profond du long-métrage.

Réalisé avec brio, parfaitement scénarisé et très troublant car loin d'être violent malgré le sujet, Frédéric Videau réussit l'exploit de parler de séquestration sans aller dans des excès de scènes choquantes. Bien au contraire, on a parfois l'impression troublante d'un père et d'une ado lorsqu'on regarde évoluer Gaëlle et Vincent; duo perturbé et perturbant. Agathe Bonitzer (A deux c'est plus facile, La Religieuse) est parfaite physiquement parlant pour ce rôle. Son regard est profond et rempli de sens dans les moments de silence. Une belle prouesse pour l'actrice malgré un rôle difficile. J'ai été un peu plus déçu par Reda Ketab (Hippocrate, Les Petits princes) que je n'ai pas toujours trouvé à la juste mesure de son personnage. C'est bien là le seul point négatif que j'émettrais sur ce film qui m'a profondément touché et qui fera sans aucun doute réfléchir ses spectateurs. Enfin, la scène du train est bourrée de sens et vraiment parfaitement jouée et scénarisée.

En bref, plus profond qu'il n'y paraît, ce film traite non pas d'une séquestration mais d'une double libération, de la relation si particulière entre Gaëlle et Vincent et ne se corrompt pas dans des violences inutiles mais reste juste du début jusqu'à la fin.

Bande-annonce:

Synopsis:

"Gaëlle est soudain libérée par Vincent, son ravisseur, après huit années d’enfermement, où chacun a été « tout » pour l’autre.
Cette liberté gagnée jour après jour contre Vincent, Gaëlle doit à nouveau se l’approprier dehors, face à ses parents et au monde qu’elle découvre."