Le Journal intime d'un arbre

Récompensé de nombreux prix littéraires (prix Goncourt pour Un Aller simple, prix Femina Hebdo pour La Demi-pensionnaire, etc.), Didier van Cauwelaert signait en 2011 un ouvrage au titre intriguant: Le Journal intime d'un arbre. Paru chez Michel Lafon, ce roman donne la parole à un poirier de presque 300 ans qui chute dès la première phrase du livre...

Etonnante leçon sur la nature humaine par la biais d'un arbre. Voilà qui résume rapidement l'idée de ce livre. Titre original et idée on ne peut plus fantaisiste, l'auteur s'est inspiré de la mort de son poirier pour raconter la vie de cet arbre. Je ne m'attendais pas, par contre, à commencer le texte par la chute du poirier et je croyais que ce livre serait le récit de vie d'un arbre "en point fixe". Mais c'est avec surprise que j'ai suivi "l'âme" (peut-on parler d'âme ici?) de Tristan, voyageant de pensées humaines en souvenirs de sa vie. Finalement, l'arbre, en tant qu'entité physique, disparaît rapidement dans le passé, son avenir incertain n'est qu'immatériel et complexe. Bien que la narration, les échanges et relations entre les différents personnages de ses dernières années de vie, soit intéressant, ce sont pricnipalement les passages sur l'histoire en flash-back de cet arbre qui m'ont captivés. Je reste en quelque sorte sur ma faim quant à l'idée que je m'étais faite de ce livre. Le titre n'est peut-être pas tout à fait approprié en fin de compte: il s'agit plutôt du Journal intime d'un arbre mort. J'aurai aimé lire le récit d'un arbre qui développe, sa vie, et non celle d'humains, moins intéressane et maladroitement contée. Je rajouterai également une faiblesse à l'ensemble: la tentative de suspens sur les origines de Tristan ne prend pas et on oublie rapidement cette anecdote mystérieuse jusqu'à ce qu'on nous en donne la solution.

"Entre un champignon ou une fourmi avec qui je communique sans problèmes et un humain qui se raconte des histoires, mon choix est clair. J'ai toujours privilégié la fiction à l'information pure. Question d'urgence : végétaux et animaux ne perdent jamais ce qui est gravé dans leurs gènes, tandis que les humains ont tendance à devenir des machines qui pensent mais n'imaginent plus. Les quelques individus qui ont su me faire rêver durant ma vie, je leur dois ma longévité. Parce que l'intelligence, la poésie, l'humour sont des nutriments aussi nécessaires pour moi que les protéines du sol. Vos mauvaises ondes m'affaiblissent, vos bonnes vibrations me renforcent. Un arbre ne cherche pas que la lumière. Du moins, il la cherche partout."

Mis à part cette opinion en demi-teinte sur le fond de l'histoire, j'ai trouvé l'écriture de Didier Van Cauwelaert très agréable à lire, fluide, jamais ennuyeuse. C'est un des points les plus forts de ce roman très certainement. Autre aspect positif: le message de vie qui se diffuse dans les pages tout comme la sève coule dans un arbre. Même si la vie des humains du présent est chaotique, même si l'histoire passée de Tristan est dramatique, il y a toujours du positif qui en découle. Et ce message a réussi à m'émouvoir. J'ai également beaucoup apprécié la théorie de la vengeance des arbres sur l'humanité via les "hormones de dépression". 

Original dans sa vision des choses, l'auteur sait captiver son lecteur malgré de véritables faiblesses dans son histoire. En bref, je le conseille à toute personne un brin curieuse, aux amoureux des arbres qui se plairont au contact de ce tri-centenaire et même aux non-lecteurs qui ne devrait pas rencontrer trop de difficultés à dévorer ses pages.

Vous pouvez lire les premières pages ici.