A présent, vous pouvez enterrer la mariée

Vous connaissez maintenant mon amour pour Oren Miller, qui m’avait provoqué un grand coup de coeur pour son polar J’agonise fort bien, merci, l’an dernier, puis un grand plaisir avec le roman fantastique Le Tyran des songes. Elle vient tout juste de publier la suite de J’agonise, toujours aux éditions de L’Homme sans Nom et ça s’intitule BOB… ah non excusez-moi, ça c’était le nom de code pour parler du livre dont le titre à rallonge est A présent, vous pouvez enterrer la mariée. Alors, le coup de coeur polar se confirme-t-il?

« Un paon n’était pas connu pour autre chose que sa capacité à agiter ses plumes.»

Donnez-moi en encore!!!

Sans surprise, je suis conquise et je pourrai même me mettre à faire des rimes pour déclarer mon amour pour la prêtresse du cynisme et du crime. J’avais eu un grand coup de coeur pour le polar historique aux accents bretons qu’était J’agonise fort bien, merci, et j’avoue que j’avais une hâte infinie de me plonger dans la suite pour deux raisons: retrouver les deux enquêteurs et en particulier Evariste qui a été le personnage le plus marquant de l’année 2016 pour moi, et pour voir si le talent d’Oren Miller pour le polar se confirmait avec un récit en-dehors de ma région natale pour laquelle j’ai un amour infini. Et je suis plus que ravie d’avoir adoré tout autant, voir même plus A présent, vous pouvez enterrer la mariée. Premièrement, c’est pour la plume que je craque. Oren Miller maîtrise un style bien à elle, qui nous embarque pleinement dans les années 50, dans des lieux très différents les uns des autres, avec une facilité déconcertante. Lorsque je me plonge dans ses mots, je ne suis plus là pour personne. C’est riche, c’est détaillé, c’est immersif et l’ambiance est impeccable. L'auteur a également un sens de la formule inné. Je ne compte plus le nombre de post-it dont j'ai farci le livre pour marquer chaque citation que je jugeais mémorable! Elle maîtrise également toujours aussi parfaitement un cynisme dont je raffole en littérature. Evariste en tête en est le maître mais je dois dire que le petit Isabeau a fait du chemin et commence à sortir de magnifiques piques lui aussi. Leurs échanges sont jouissifs. Et leur majordome Georges, que j’avais tant affectionné dans le premier livre, se révèle encore plus être génial et un pro des soufflés (je ne dirai jamais le contraire). Je ne me lasse pas de trouver Evariste insupportable et fabuleux. Ce personnage est vraiment parfait à tous points de vue, détestable mais ultra charismatique, on se plait à le détester et on finit par l’adorer au point de ne plus vouloir le lâcher à la fin du livre. Un regret? J’aurai adoré un échange perché entre Jaros et lui… mon Dieu que cette idée me paraît géniale. Bref, à quand la suite?

« - Êtes-vous en train de nous dire que vous êtes l’un de ses enquêteurs? interrogea Fidélia.

- Exactement, ainsi que mon associé que voici et qui fait ses débuts. Un peu chaotiques, mais très prometteurs.

- Je suis à côté, indiqua Isabeau sur un ton légèrement blasé.

- Heureusement, il est très beau, c’est un indéniable avantage stratégique.

- Je suis toujours à côté.»

Quand Agatha rencontre Conan Doyle

Je me répète par rapport au premier livre mais je trouve que c’est encore plus frappant ici: Oren Miller a de l’Agatha Christie dans son écriture (à laquelle elle fait encore une référence discrète mais inévitable quand on est fan), tout en maniant un duo de personnages dignes de Sherlock et Watson. L’enquête est raffinée, complexe et riche mais elle laisse au lecteur le soin de faire, lui aussi, son cheminement de pensée avec les enquêteurs. C’est élégant, captivant et vraiment bien ficelé et cela démontre un indéniable talent pour le polar de la part de l’auteur. Dieu qu’on voyage dans cette enquête en plus! Un vrai dépaysement. De plus, quelques petites nouveautés dans la plume d’Oren Miller parsèment le récit: j’y ai trouvé une émotion sincère et touchante que je n’avais pas encore décelé pleinement et je dois dire que ça a rendu l’ensemble plus que parfait pour moi. C’est subtil et discret et donne à l’histoire une dimension nouvelle de beauté. Alors du coup je suis passé du rire franc, aux larmichettes au coin de l’oeil, j’ai passé des moments intenses à réfléchir à l’enquête et d’autres à me laisser porter par les réflexions des personnages… et au final je n’arrivais pas à décrocher du livre. Ces quelques 380 pages se dévorent! Enfin, c’est un détail mais c’est à souligner: l’objet livre est somptueux. Non seulement la couverture d’Emile Denis est à tomber par terre, mais on a aussi le droit à une illustration d’Oren Miller très élégante à l’intérieur et à une mise en page très soignée. Un vrai plaisir tant visuel que littéraire. 

« Peut importait les activités sordides, les malversations et autres illégalités en tout genre dans lesquelles vous trempiez, l’essentiel était qu’en public l’image reste lisse. L’aspérité était diabolique. »

En bref, si vous aimez un peu ou beaucoup le genre du polar, si vous n’avez rien contre un brin de cynisme, si vous avez envie de plonger dans une ambiance années 50 élégante et raffinée, mais également impitoyable, foncez lire les polars d’Oren Miller. Je pense honnêtement que lire le premier n’est pas nécessaire pour lire celui-ci, mais vous perdriez un peu de sa saveur en chemin et ce serait dommage, notamment pour l’évolution des deux enquêteurs. 

«Monsieur et Madame Bartoli,

Monsieur et Madame Bélanger,

Ont la joie de vous faire part du mariage de leurs enfants

Apolline & Adam

Qui sera célébré le 19 juin 1952 à 14 heures,

En la cathédrale de Monaco.

La cérémonie sera suivie de la combustion spontanée de la mariée. 

Hyppolite Bartoli est fou de douleur. Le jour du mariage de sa fille, celle-ci est retrouvée brûlée vive alors que la robe qu’elle porte est restée intacte. N’ayant aucune confiance en la police, il fait appel à deux enquêteurs dont la spécialité est de résoudre les énigmes les plus étranges. 

Et très vite, le mystère et les morts s’empilent en variant les modalités : fusillade, cannibalisme, crise de folie inexpliquée et empoisonnement. De quoi alimenter les théories les plus folles et multiplier les suspects les plus intouchables de la bonne société.

La solution de l’énigme se trouve-t-elle dans les hautes sphères du pouvoir… ou tout simplement sous le voile de la mariée ?»

(Illustration de couverture : ©Emile Denis)

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